La Villa René Lalique, où officie le chef autrichien Paul Stradner, fête ses dix ans
avec un menu d’une suprême élégance fait de plats emblématiques de la maison alsacienne.
« Nous nous sommes plongés dans les archives en ressortant toutes les cartes depuis 2015, ce qui a permis de voir comment la maison avait évolué. Des plats oubliés ont même été retrouvés », sourit Paul Stradner. Parmi eux, un génial rouget barbet venant réactiver une composition de 2018 qui utilisait du bar. La substitution a été rendue nécessaire, puisque le chef se refuse désormais à travailler des espèces en tension : « Nous avons essayé, et le choix s’est révélé payant. Les saveurs sont extraordinaires », résume-t-il. Impossible de le contredire, tant la chair d’une intense finesse – avec ses souvenirs prégnants de sucrosité et sa puissance marine affirmée – convole avec bonheur en justes noces avec l’acidité fruitée du yuzu et une vinaigrette à la fleur de sureau d’une aérienne amertume, renforcée par un pakchoï. Le cuisinier marche sur un fil, trouvant les justes équilibres dans un plat idéal pour l’été qui pourrait bien devenir un étendard pour la maison alsacienne, distinguée par deux Étoiles au Guide Michelin.
Dans un menu en dix étapes, se découvrent également des classiques, comme l’œuf parfait « Sarah Bernhardt » (2020), hommage à celle qui fut une des muses de René Lalique – soyeuse sauce beurre blanc, champignons de Paris et pincée d’estragon, what else ? – ou le cappuccino de pommes de terre à la truffe (2015), référence à Jean-Georges Klein, premier à œuvrer au piano de Wingen-sur-Moder. Au diapason, les flacons choisis par Romain Iltis, sommelier d’élite, sont de jolies découvertes, qu’ils magnifient les vignobles du maître des lieux, Silvio Denz, ou proposent des échappées belles avec, par exemple, un superbe vin doux corse du Domaine Leccia. Nous sommes par ailleurs restés admiratifs devant les Kartoffelnudeln (2022), plat-signature de Paul Stradner incarnant à la perfection le « Triple A » qui marque sa philosophie culinaire : terroir alsacien, réminiscences autrichiennes et souvenirs d’Allemagne, où il officia. D’une gourmandise extrême, cette réalisation éminemment terrienne, marquée par une grande douceur, associe escargot, persil et raifort dans un triptyque explosif prenant une forme oblongue. Si les apparences sont simples, rustiques même, la profondeur du goût est toute d’aristocratique complexité et de transparence gustative… On est plus proche de la musique de chambre de Ravel que d’une symphonie de Bruckner ! Là encore, l’assiette se révèle fort bien balancée, à l’image d’un menu qui exprime l’âme de la Villa.
La Villa René Lalique est située 18 rue Bellevue (Wingen-sur-Moder). Ouvert mardi et mercredi (au dîner uniquement) et du jeudi au samedi. Menu anniversaire à 240 ou 270 € disponible jusqu’à fin 2025. Autres menus de 170 à 230 €
villarenelalique.com
> Soirée spéciale pour les dix ans de la Villa avec Paul Stradner et Jérôme Schilling, aux commandes du restaurant doublement étoilé Château Lafaurie-Peyraguey à Bommes (19/09)
