Futur dystopique, récit initiatique et secrets de famille : 3 livres à dévorer
La rédaction vous conseille deux romans graphiques et une BD afin de lutter contre ce morne automne : C’est où, le plus loin d’ici ?, La Mise à mort du tétras lyre et La Maison du canal.
Glauque futur
Saga post-apocalyptique originellement publiée aux USA – dont les deux premiers volumes viennent d’être simultanément traduits –, C’est où, le plus loin d’ici ? est un objet artistique difficilement identifiable. Le lecteur est en effet propulsé dans un futur où la société que nous connaissons n’est plus que ruines. Rien que de très classique, me direz-vous. Reste que cet univers est peuplé de gangs d’ados qui ne veulent surtout pas grandir (puisque celui qui devient adulte est impitoyablement chassé), s’affrontant sans merci ! À la fois fable punk et réflexion sur l’adolescence, sans doute l’âge de l’existence le pus délicat, cette série scénarisée par Matthew Rosenberg (qui a œuvré dans le monde des comics, imaginant des histoires des X-Men, de Spider-Man, etc.) est un roman graphique étrange qui débute lorsque la jeune Sid, convaincue qu’il doit y avoir quelque chose de plus et de mieux que l’espace où elle (sur)vit avec les siens, décide de tailler la route. On reste scotchés par les dessins de Tyler Boss, qui rend avec délicatesse cette atmosphère sombre et mélancolique.
Paru chez Casterman (25,95 €, volume 1 et 20 €, volume 2)
casterman.com
Émouvante montagne
Si on avait pu remarquer le trait de David Combet dans différents opus, il signe là son « vrai » premier album, réalisant dessins et textes… Et pour un premier essai, c’est un coup de maître ! La Mise à mort du tétras lyre, entièrement réalisé en couleurs directes, se révèle réussi. Dans ce roman graphique, l’enfant de Chambéry emporte son lecteur dans ses montagnes sur les traces de Pierre, un enfant sensible, amoureux de la nature. Son père aimerait bien le voir camper, chasser, cogner pourquoi pas… Mais il est aux antipodes de ces valeurs « masculinistes ». Rêveur et poète, il découvre qu’il aime les garçons mais ne l’accepte pas. À l’âge adulte, il doit affronter son passé, la trentaine venue, pour se réconcilier enfin avec lui-même, alors que son existence, de refoulement en refoulement, est en pause sentimentale et professionnelle. David Combet livre un récit d’initiation de haute volée.
Paru chez Glénat (25 €)
glenat.com
Tristes Flandres
L’adaptation en BD des « romans durs » de Simenon (ainsi nommés par l’auteur lorsque Maigret n’y apparait pas) se poursuit : après des réussites comme La Neige était sale (par Jean-Luc Fromental et Bernard Yslaire), c’est un quatrième opus qui voit le jour avec La Maison du canal. Au scénario, José-Louis Bocquet – qui s’était déjà colleté avec Le Passager du Polarlys – rend avec brio le climat oppressant du livre de 1933, débutant par l’arrivée d’une jeune orpheline de seize ans dans la ferme de son oncle. Edmée a quitté Bruxelles pour le Limbourg et le contraste est violent entre la grande ville et la campagne flamande, si triste qu’un canal s’est pendu… Au dessin, Édith explore finement cette atmosphère grise et spleenesque, zébrée de secrets de famille et de désirs inassouvis. Un très grand album !
Paru chez Dargaud (22,95 €)
dargaud.com
