Le roi d’Arbois

Les pieds puissamment ancrés dans le terroir jurassien et la tête dans les étoiles, Jean-Paul Jeunet imagine une cuisine qui marque les sens. Longtemps après avoir dégusté certains de ses plats, leur empreinte est en effet encore présente, vigoureuse, dans les esprits.

Un sourire radieux et deux phrases résumant tout : « Un cuisinier qui n’est pas généreux est un cuisinier triste. Celui travaille avec amour transmet de l’amour. » Jean-Paul Jeunet (deux Étoiles au Guide Michelin) est un chef – même s’il n’aime pas ce titre – au talent exceptionnel. De « l’auberge gourmande de province » familiale reprise dans les années 1980, il a fait un établissement renommé dans le monde entier où se déploient les fastes d’un art né de ses multiples expériences. Passé par les plus grandes maisons – chez Jean Troisgros ou Gaston Lenôtre – et influencé par le créateur le plus inventif des seventies, Alain Chapel, il revendique des imprégnations variées, mettant à la sauce contemporaine saveurs et odeurs d’autrefois. Lorsqu’il parle de sa grand-mère, « une merveilleuse cuisinière », ses yeux s’illuminent au souvenir des « premiers désirs gourmands, comme cette crème de lait dont elle se servait pour faire des sèches », spécialité franc-comtoise qui a la semblance de crêpes dures et légèrement cloquées, présentes il y a quelques années, revisitées, au menu du restaurant à la manière d’un vibrant hommage.

La carte ressemble à une promenade sensuelle dans un terroir dont Jean-Paul Jeunet est amoureux fou et dont il explore inlassablement les potentialités, parcourant les chemins alentours à la recherche d’herbes : « Ce n’est pas un hasard si le bon Dieu a mis le Comté à côté du Vin jaune », glisse-t-il, malicieux. Toujours à la recherche du plat parfait, une « triangulation entre des nuances de textures, de couleurs et de saveurs », il est convaincu « de ne jamais pouvoir y arriver. Du reste ce ne serait pas souhaitable. » Dans sa Poulette de Bresse, morilles & Vin jaune nous n’en sommes pourtant pas loin : la perfection des deux cuissons – cuisse pochée et aile cotisée de foies blonds et épices Massala – et les alliances idéales de goûts laissent dans l’esprit un souvenir durable. Tout comme l’Émulsion de Mont d’Or aux trompettes de la mort, croquant de pommes de terre accompagnée d’un stratosphérique Château-Chalon (2006) du Domaine Berthet-Bondet choisi par Alain Guillou (sommelier de l’année 2013 au Gault et Millau), intarissable et précis sur les Savagnins, Poulsards (ou Ploussards) et autres Vins de paille.

Le restaurant Jean-Paul Jeunet se trouve 9 rue de l’Hôtel de Ville, à Arbois. Fermé mardi et mercredi. Menus de 70 € à 147 €.

03 84 66 05 67 – www.jeanpauljeunet.com

Rencontrez Jean-Paul Jeunet à EGAST (à Strasbourg, au Parc Expo, du 15 au 18 mars – www.egast.fr) dimanche 16 mars. Il cuisinera un Foie gras de canard poché au consommé de racines, gelée de pain perdu au Vin jaune

 

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