French touch

Philippe Bianconi © Lyn Bronson

Sous la baguette de Petri Sakari, l’Orchestre philharmonique de Strasbourg accueille un des plus intéressants pianistes de la scène internationale, Philippe Bianconi, héritier de la grande tradition française du clavier.

Dans l’hexagone, on connaît mal Philippe Bianconi, pianiste (trop) discret qui a fait l’essentiel de sa carrière à l’étranger, aux États-Unis principalement. Son succès au Concours Van Cliburn de Fort Worth – un des plus prestigieux au monde – en 1985, où il remporte la Médaille d’Argent, a en effet généré de multiples engagements américains. « C’est vrai que je ne venais pas trop en France », explique-t-il « mais, depuis quelques années j’essaie d’être plus présent. » Trop réservé, l’artiste ? « Vous savez, je ne me préoccupe guère de mon image. Peut-être est-ce un défaut dans le monde actuel, mais en cultivant trop l’extérieur on oublie l’essentiel. »

Le jeune quinqua est un éminent représentant de ce qu’il est convenu d’appeler “l’école française” : il a étudié au Conservatoire de Nice avec Simone Delbert-Février, une élève de Robert Casadesus, puis, à Paris, avec Gaby Casadesus, l’épouse de ce dernier, qui donnait à ses élèves des conseils reçus directement de la bouche de Maurice Ravel. Si certains se bornent à désigner sous cette appellation « un jeu perlé, très propre et sans effets de manche, la tradition française va au-delà d’un style marqué par une grande pureté et une certaine sobriété » rappelle  Philippe Bianconi. Et de rajouter : « Simone Delbert-Février m’a enseigné l’intensité dans l’expression et nous travaillions la sonorité en allant au plus profond du clavier. Elle m’a aussi appris à ne jamais oublier d’être heureux en jouant. Avant un concours, elle me serrait les deux mains très fort, me regardait dans les yeux et disait : “Maintenant, oublie tout ce que nous avons dit et ne pense qu’à te faire plaisir”. J’essaie de m’en souvenir aujourd’hui encore. »

À Strasbourg, le virtuose interprétera, au cœur d’un programme 100% russe (qui inclut aussi les Tableaux d’une exposition de Moussorgski, dans la très rare orchestration de Leo Funtek), le Concerto pour piano et orchestre n°3 de Rachmaninoff, « un véritable “monstre” à l’enivrante démesure. Avec cette écriture jusqu’au-boutiste, on a le sentiment d’aller jusqu’aux extrêmes limites de l’interprète. Pour rester cohérent, j’ai choisi, parmi les deux cadences possibles du premier mouvement, de laisser de côté la plus modeste. J’ai aussi souhaité ne pas faire les coupures que l’on opère parfois dans le troisième » conclut-il.

À Strasbourg, au Palais de la musique et des congrès, jeudi 9 et vendredi 10 février 03 69 06 37 06 – www.philharmonique.strasbourg.eu

http://www.youtube.com/watch?v=fFOt3Q–6nA

Philippe Bianconi joue Poissons d’or de Debussy (extrait du Livre II d’Images) à la Laeiszhalle de Hambourg (19 novembre 2009)

 

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