Bonjour tristesse

Dans Culbutes, les nouvelles graphiques de Sammy Harkham, teintées de spleen et d’inquiétude métaphysique, sont plus amères que douces.

Que ses personnages soient des marins (dans une très libre adaptation d’une nouvelle de Maupassant publiée dans ses Contes de la bécasse et intitulée En mer), un scribe besogneux d’un shtetl d’Ukraine, des adolescents australiens qui découvrent la sexualité en s’emmerdant dans une banlieue pavillonnaire, Sammy Harkham entraîne son lecteur dans de brefs récits cinglants au lyrisme parfois maladif. Le bonheur y existe uniquement comme idéal. Impossible à atteindre, évidemment. Toujours gâché. C’est cette poésie douloureuse que le trentenaire américain encore mal connu en France nous invite à explorer grâce à une économie de moyens volontairement entretenue : avec un sens de l’ellipse affirmé et un exquis trait minimaliste, il restitue le suc des situations. Ce récit “à l’os” renforce la charge émotionnelle d’histoires où la banalité acquiert une surprenante densité : il y a longtemps, par exemple, que nous n’avions pas vue description aussi subtile des affres de l’adolescence et des abysses qui hantent cette période où l’innocence se perd… qui est également celle de tous les possibles.

Culbutes est paru chez Cornelius (19,50 €)

www.cornelius.fr

 

vous pourriez aussi aimer