Collaboration entre trois institutions contribuant au rayonnement de l’art contemporain, L’Ill emporte le visiteur dans les méandres d’une rivière alsacienne emblématique.
Traversant l’Alsace du Sud au Nord sur près de 220 kilomètres – des pentes du Glaserberg au Rhin, dans lequel elle se jette à Offendorf –, l’Ill structure la région. Elle est l’épine dorsale tout autant que le substrat d’un parcours tricéphale se déployant dans des espaces comme le CEAAC (Strasbourg), avec Mirage du Duo -Y- , que l’on peut visiter, chaque premier week-end du mois avec des baguettes de sourcier, fruit du travail d’un réparateur d’instruments à vent du Pays basque et d’un couple de « potiers-magnétiseurs » d’Outre-forêt. Au Crac Alsace (Altkirch), est montrée Pellicule de Sauvagerie, exposition collective dont le titre renvoie au retour à l’état premier d’une rivière, comme si l’onde était à la recherche d’une délivrance, histoire d’oublier les interventions que l’Homme lui a fait subir. C’est ce qu’explore le duo italien Caretto & Spagna, qui souhaite symboliquement « réparer » le flux. Pour sa part, la Coréenne Seulgi Lee capture les eaux – de l’Ill, mais aussi de la Durance, du Sankt Jørgens Sø, etc. – et les encapsule dans des « flacons amulettes » où l’énergie aquatique se fait vitale. Citons aussi la Danoise Marie Raffn qui fait référence au passé industriel du Sud de la région, en créant de singuliers tissages à partir d’images numériques – alliance de la technologie et de l’artisanat – dévoilant aussi bien les reflets changeants de la surface liquide que les algues qui cascadent en dessous.
À La Kunsthalle (Mulhouse), Sandrine Wymann a réuni onze artistes pour Déborder la rivière, qui fait se mêler la voix de l’Ill « à celle des hommes, des plantes et des animaux pour raconter un écosystème idéal dans lequel les droits de chacune des composantes seraient entendus », résume-t-elle. Voilà propos allant au-delà de la région… Dialoguent ainsi les créations de la Colombienne Mariana Murcia – également présente au Crac où elle transforme l’eau de la source de l’Ill en hydromel vibratile, la mêlant au miel local –, du duo Encastrable (Antoine Lejolivet & Paul Souviron), en résidence cette saison à Mulhouse, ou de Guillaumit, dont le monde ludique se déploie sur la façade de la Fonderie en une fresque interactive en forme de déambulation topographico-historique. Enfin, impossible de ne pas citer Reciprocal Sacrifice (2022), vidéo de Carolina Caycedo montrant le voyage d’un saumon qui cherche à regagner sa frayère des Rocheuses, prétexte à évoquer le réchauffement de la Snake River ou la place du poisson dans la vie de la tribu amérindienne des Nez-Percés, nous enjoignant à une cohabitation apaisée avec les animaux.
Au CEAAC (Strasbourg) jusqu’au 7 septembre, au Crac Alsace (Altkirch) jusqu’au 21 septembre et à La Kunsthalle (Mulhouse) jusqu’au 26 octobre
ceaac.org – cracalsace.com – kunsthallemulhouse.com