Univerres d’artistes

Egidio Costantini avec Georges Braque, Incontro, 1954 © François Fernandez Photographe

Au Musée Lalique, les maîtres de l’Art moderne rencontrent le verre. Une vingtaine de pièces témoignent de l’art d’Egidio Costantini qui collabora avec les plus grands créateurs du XXe siècle : Picasso, Kokoschka, Braque, Arp, Chagall, Ernst…

Egidio Costantini (1912-2007) « pense avec le cœur et c’est par le souffle des forges du cœur qu’il prolonge les audaces transparentes et gracieuses de Venise », admira Jean Cocteau. Rien ne prédisposait cependant le verrier italien à embrasser une profession à laquelle il vint sur le tard et par hasard : alors distillateur de bois, il découvre dans ses fours refroidis d’étonnantes cristallisations aux envoutantes teintes bleues. Il décide de s’orienter vers le verre, se rend à Murano. D’abord représentant, il ouvre rapidement son atelier. Souhaitant travailler avec des artistes, Costantini envoie, au culot, une cinquantaine de lettres : seul le surréaliste Kino Krayer répond. Ce sera la première collaboration d’une longue série : dès le début des années 1950, il transforme des dessins de créateurs majeurs en œuvres en trois dimensions gracieuses, dans sa Fucina degli Angeli (Forge des Anges), réalisant l’alliance parfaite entre art et artisanat avec l’amicale complicité de la célèbre collectionneuse et mécène Peggy Guggenheim.

« Je voulais trouver un autre ordre, une autre valeur de l’homme dans la nature. Il ne devait plus être la mesure de toute chose, ni tout rapporter à sa mesure, mais au contraire toutes choses et l’homme devaient être comme la nature, sans mesure. Je voulais créer de nouvelles apparences, extraire de l’homme de nouvelles formes » écrivait Jean Arp dans Jours Effeuillés. Les pièces de verre ici présentées – le relief organique qu’est Figura-Torero et les formes d’une intense douceur de La Famiglia ou de Due Pupi – illustrent le crédo du natif de Strasbourg avec leur aspect épuré où se devine une puissante pulsation vitale. Impression similaire dans le surprenant Bucranio du Corbusier évoquant de manière méditative le crâne d’une improbable bestiole appartenant à une espèce sans doute disparue depuis des millénaires. Au fil d’une exposition élégamment scénographiée – qui tient à la fois de l’aventure esthétique en forme de jeu permanent avec la lumière et de défi technique – on croise également deux charmants profils se faisant face, amoureux, de Georges Braque, les créations évoquant les vitraux de la Cathédrale de Metz de Marc Chagall, les animaux étranges de Max Ernst, le bestiaire fantastique de Pablo Picasso et l’abstraction géométrique rigoureuse de Lucio Fontana.

À Wingen-sur-Moder, au Musée Lalique, jusqu’au 3 novembre
03 88 89 08 14 – www.musee-lalique.com

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