Siddhartha

Avec Vertical Road, le chorégraphe londonien d’origine bengalaise Akram Khan propose une expérience visuelle et sensorielle inspirée d’une profonde spiritualité orientale.

Le breakbeat de percussions profondes et graves de Nitin Sawhney, compositeur et producteur londonien d’origine indienne, nous saisit aux tripes. Le son sourd tape dans l’obscurité. La lumière crue éblouit. Le choc rétinal encaissé, se dévoile une scénographie minimaliste : plateau nu, un grand voile de plastique cachant l’ensemble du fond de scène laisse entrevoir les contours déformés d’un homme éclairé de dos. Au-devant, un groupe de danseurs drapés à l’extrême orientale en d’amples tissus évolue dans ce qui s’apparente à des katas, mouvements chorégraphiés de manière martiale, soutenus par des lumières syncopées. Ce mélange de danse indienne traditionnelle kathak passée au révélateur de la danse contemporaine hypnotise. Ces interprètes – huit hommes et femmes venus d’Espagne, d’Égypte, de Taïwan, de Slovaquie, de Grèce, de Corée ou encore d’Angleterre – inventent une cérémonie haletante dans laquelle les frappes des mains sur les corps et habits gorgés de talc laissent s’échapper des nuées de poussière blanche, traces des troubles produits en fendant l’air. La verticalité est de mise, les chutes incessantes, les corps secoués par leurs démons intérieurs comme des spasmes qui, jamais, ne les laissent tranquille.

Il y a de la danse votive dans cette recherche ontologique de rapport aux éléments, à la terre, à la fondation de soi-même. Le corps est pensé comme le lieu de la mémoire culturelle, des empreintes de l’histoire personnelle et collective. Vertical Road est un parcours initiatique : celui du merveilleux interprète principal – chevelure abondante et ondulante, barbe profonde et peau satinée – qui n’est pas sans rappeler celui de Siddhartha dans le roman éponyme du prix Nobel de littérature, Hermann Hesse. S’inspirant des textes du poète persan Rûmi, fondateur du soufisme, Akram Khan construit des transes habitées, des tourbillons de spirales et de voltes, des ondulations fiévreuses, fluides et étourdissantes qui sont autant de questionnements existentiels, de quête de verticalité d’un individu face au groupe, d’un homme face à l’amour. S’élever de sa condition terrestre vers une pure spiritualité de l’être, détachée de ses racines tribales, païennes ou religieuses. Une quête de plénitude, d’absolu et d’essentiel.

À Mulhouse, à La Filature, mardi 20 novembre
03 89 36 28 29 – www.lafilature.org
www.akramkhancompany.net

vous pourriez aussi aimer