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Photo de Sarah Bastin

Le rock sans voyelles de MNNQNS frappe fort avec Body negative, premier album jonglant entre punk indé grésillant et hit léchés, façon pop anglo-saxonne. Un grand écart décrypté par Adrian, fondateur du groupe.

Entre Cardiff, où vous avez suivi des études de musicologie, et votre retour à Rouen en 2013, quand intervient la création de MNNQNS ?
À mon retour à Rouen, même si les premiers morceaux ont été composés à Cardiff, une ville qui m’a inspiré, où j’étais plongé dans la culture rock anglaise. Il y a eu pas mal de changements de line up avant que je rencontre Grégoire en 2017, puis Marc et Félix. L’actuelle, c’est juste après notre EP Advertisement en 2018 !

Qu’est-ce qui a fait passer au groupe le cap du long format ?
Ce cap a été naturel. Le fait d’avoir un noyau dur et de pouvoir travailler avec des personnes qui apportent des idées nous a facilité la tâche. Nous avons trouvé une première formule avec cet album. Ensuite, tu exploites ce qui fonctionne sur le moment et après il faut très vite t’en détacher, sinon tu fais la même chose pendant quarante ans, comme ACDC (rires). Pendant le confinement, il y a aussi eu la série de cover Flesh & Bones, des reprises de musiques dites mainstream. On voulait un décalage entre ces morceaux, choisis volontairement pour ça, et ce truc un peu pirate des magnétos à bandes.

Pourquoi cette série de cover confinées ?
On a pu y tester d’autres options, un peu plus crados comme mettre des patterns à moitié
disco sur la reprise de Sloop Jonh B des Beach Boys. Sur Material girl de Madonna, il y a des sons industriels de percussions, des bouts de tôle sur lesquels on frappe. Cette série, c’est un crash-test pour de nouvelles techniques, de nouveaux sons. D’une certaine manière, a nous permet de faire découvrir aux gens le virage de nos futures sorties. On a joué Material girl juste avant le confinement, en début de set. Ça permet d’articuler le live et de créer une surprise, d’apporter quelque chose de familier que l’on dégomme.

Comment jonglez-vous avec toutes les étiquettes qu’on vous colle ?
Vu qu’on écoute et expérimente différents genres, c’est vrai qu’il est facile de tomber dans un fourre-tout. L’astuce est de savoir ce que tu n’aimes pas pour trier, éliminer et conserver les outils que tu préfères et les faire fonctionner entre eux. Quitte à faire l’effort de rentrer dans un genre de musique que tu n’imaginais pas, pour découvrir que tu peux t’y retrouver. Je pense au Dub. Aujourd’hui, je suis fan du travail sur ces sons. On se sert de certaines techniques de Lee Scratch Perry par exemple.

Photo de Sarah Bastin


De l’intro à l’outro, il y a une grande cohérence entre les pistes. Jusqu’où maîtrisez-vous cela ?


On a essayé de laisser des sucreries dans l’album. L’intro en fait partie et correspond à une fin de chanson en miroir. Régulièrement, nous essayons d’expérimenter, écoutant, par exemple, l’album à l’envers pour voir ce qui se passe. Il y a eu ce moment qui ressortait. Qui avait ce truc à la fois texturé, abstrait et en même temps, hyper rythmique. Je trouve que c’est une bonne mise en bouche. Plus on peut laisser des petits trucs comme a dans un album, plus on peut laisser l’occasion aux auditeurs de le réécouter. Si tu as un album sans surprises, à la première écoute tu as déjà tout cerné et tu passes à autre chose.

Stagnant pols est un instant space rock : un clin d’œil à Bowie ?
On s’est permis de créer plus de textures psychédéliques et d’ambiances dans la seconde partie, car c’est dans la continuité du propos. L’intro prolonge nos EP punk. Arrive cette cassure, avec des titres comme Desesperation Moons, plus léché. À partir d’Urinals, l’album change de visage et passe d’un punk-rock grésillant à un côté plus friendly, psyché et avec de longues plages expérimentales comme la fin de Limits of towns, ou Stagnant pools justement qui redescend complètement, jusqu’à cette dernière cassure avec Wire. J’aime enchaîner les ambiances, comme Bowie, au sein d’un même morceau.

MNNQNS sur scène, qu’est-ce que ça change ?
Le fait d’avoir finalisé un long format a permis d’expérimenter plus de choses. Fatalement, a ce ressent. Ce qui est cool avec le live, quand tu transposes sur scène un album studio, c’est que si tu as des moments psychés, tu les rallonges. Tu as une carte à jouer qui permet d’exagérer tes choix en créant des moments hors format rock. On a une improvisation de cinq minutes pendant laquelle il n’y a plus de batterie, de rythme. On frôle Brian Eno. C’est important, car c’est notre fa on de rappeler que nous ne sommes pas qu’un groupe de rock standard.

Comment espérez-vous la reprise des concerts ?
Qu’il n’y ait pas un mètre de distance et de masques dans la salle, afin de pouvoir se marrer comme avant. Mais bon, on fera avec !


À La Laiterie (Strasbourg), vendredi 25 septembre
artefact.org

Au Forum (Charleville-Mézières), samedi 7 novembre
charleville-mezieres.fr

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