Perfection du réel

Franz Gertsch, Gaby und Luciano 1973 E.W.K., Bern © Franz Gertsch, 2013 Photo : Balthasar Burkhard, Bern

Portraits et paysages hyperréalistes ont envahi le Museum Frieder Burda. Une trentaine de toiles et de xylographies monumentales invitent à une promenade dans l’œuvre de Franz Gertsch.

Star de la scène contemporaine, l’artiste helvète Franz Gertsch (né en 1930) est un habitué de ses grand-messes, dOCUMENTA de Kassel et Biennale de Venise en tête. Un musée lui est même consacré dans le canton de Berne… Découvrir ses œuvres in vivo demeure néanmoins, à chaque fois, une expérience et une surprise : au rez-de-chaussée du Museum Frieder Burda, les Quatre saisons (3,25 x 4,80 mètres chacune) happent le visiteur. Les tableaux ont demandé des mois d’un travail minutieux d’après photographie, seize pour Printemps, par exemple. Un sous-bois. De loin, la sensation de réel est frappante, de près on plonge dans l’abstraction et chacun est invité à réfléchir sur Le Mystère de la Nature (titre de l’exposition) qui se prolonge dans une autre série dont les herbes peintes en gros plan sont le motif principal, comme si on avait zoomé dans les Saisons pour en restituer quelques détails.

Pour Gertsch « le quelque chose, le tableau réaliste, est là d’une façon aussi parfaite que le néant, la toile blanche ». Perfection d’immenses portraits métaphysiques, presque mystiques (de Silvia ou Johanna) qui semblent flotter dans le white cube, perfection de scènes pop sociologico-arty peintes dans les années 1970 qui en figent l’esprit de la plus troublante des manières. Perfection également d’un autoportrait très années 1980 où l’artiste, là encore, saisit l’air du temps. Il entre de curieuse manière en résonance avec celui qu’il réalisa en 1955, seul petit format de l’exposition où tout l’avenir est déjà en germe avec sa volonté manifeste – mais pas encore totalement manifestée – de rendre le réel aussi réel que possible. Dans ces peintures, il nous entraîne aux confins de la représentation qui demeure le pivot de gravures, dont le format titanesque pousse la technique dans ces derniers retranchements. Elles ne reflètent cependant plus un présent mais ont la semblance de traces. Des empreintes, de simples souvenirs qui évoquent de manière troublante l’impression ressentie devant le Suaire de Turin.

À Baden-Baden, au Museum Frieder Burda, jusqu’au 16 février 2014
+49 72 21 398 980 – www.museum-frieder-burda.de
www.museum-franzgertsch.ch

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