Nature & culture

La mode des “vins natures” et les records de prix de rarissimes Bourgognes : réflexions amusées sur le (nouveau) monde du vin.

Entre l’annonce par la presse internationale qui a fait grand cas du record du prix de vente d’une bouteille de Romanée Conti 1945 à plus de 400 000 €, et la sortie de Wine Calling, film sur les producteurs de “vins natures” dont le nom même risque bien d’être retoqué par les pouvoirs publics, le monde du vin étire son espace au delà des frontières rassurantes d’un ancien monde qui tremble sur ses bases. Finalement, il y en a pour tous les goûts et toutes les bourses. Revenons aux consommateurs qui choisissent librement de faire sauter le bouchon de la dive bouteille et de partager joyeusement le précieux nectar. Ceux des vins dits “natures” nous affirment qu’on peut en boire beaucoup le soir et que le lendemain, on pourra aller travailler sans la barre au front (sic). C’est intéressant ce plaisir affiché de boire copieusement sans se soucier du lendemain, cette belle résistance affichée à l’hygiénisme ambiant qui, lui, souhaiterait bien interdire définitivement toute consommation, le vin étant une boisson alcoolisée comme les autres, qui conduit inexorablement à la maladie et à la déchéance. Si le vin “nature” nous dédouane de toute modération, il est possible de douter – d’après de multiples témoignages entendus – qu’il soit sans effet sur notre forme le lendemain d’une soirée bien arrosée ! Un argument commercial pour justifier le prix affiché de vins qui ne sont quasi plus que des vins de France et s’éloignent de la patiente construction des appellations contrôlées ? Pour avoir dégusté dernièrement un vin d’assemblage entre un Cahors et un Roussillon, tout est désormais possible dans cet univers sans limite qui détricote avec détermination et enthousiasme ce que les anciens ont mis tant de temps à construire. Ne boudons pas notre plaisir d’esthète : les étiquettes sont magnifiques…

Dans l’univers prestigieux des grandes appellations bourguignonnes, qui résistent sans surprise à l’appel de la mode “nature”, nous subissons depuis quelques années une hausse continue des prix d’achat qui rendent aujourd’hui ces vins particulièrement inaccessibles. Alors que Bordeaux s’enfonce dans une crise profonde et durable pour avoir méprisé ses consommateurs historiques, les vins de Bourgogne battent des records de prix dans les salles de vente internationales… Peu d’amateurs dans ce contexte particulier de spéculation effrénée, achètent ces vins pour les boire, mais bien pour les revendre et espérer une copieuse plus-value. On achète le vin pour ne pas le boire…

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