La diversité au coeur du Festival de Musique de Sarre
Avec pour mot d’ordre In varietate concordia, le cru 2025 du Festival de Musique de Sarre milite pour une Europe Unie dans la diversité.
Complexe et cruciale : telle pourrait être définie, pour notre continent, la période actuelle. Alors qu’est fêté le 75e anniversaire de la Journée de l’Europe – rappelant la Déclaration Schuman du 9 mai 1950 –, le Festival de Musique de Sarre tourne son regard vers l’avenir avec optimisme pour célébrer, à la fois, « l’unité allemande et l’idée européenne prenant pour devise : unité, liberté, libersité, diversité, multiplicité », résument Bernhard Leonardy et Eva Karolina Behr, à la tête de la manifestation, créant un joli néologisme. Le programme est une illustration de ce mot d’ordre : après un prélude à Berlin, tout débute en effet avec le Dresdner Kammerchor (08/05, Stiftskirche Sankt Arnual, Sarrebruck), formation de premier plan dirigée par Inga Diestel, qui propose un sacré voyage artistique transfrontalier le lendemain, donnant trois rendez-vous à Perl, Sierck-les-Bains et Schengen. Comme un magnifique symbole, le concert ressemble à un concentré de l’esprit européen, puisqu’il fait dialoguer la Renaissance germanique teintée d’italianisme de Johann Hermann Schein (avec le somptueux Ich freue mich im Herren) et le minimalisme mystique éthéré d’Arvo Pärt – Da Pacem Domine montre, s’il le fallait encore, que le compositeur estonien est un des grands de notre temps –, en passant par le romantisme de Mendelssohn, la transparence de Ravel ou encore l’engagement politique de Hanns Eisler dans l’explicite Gegen den Krieg.
Tout le festival est irrigué par cette diversité, du Quatuor Diotima (14/06, Schinkelkirche, Bischmisheim) – qui fait converser Brahms et Janáček avec la radicalité tonique et lyrique de la Partie III du Livre pour quatuor de Boulez – au baryton Benjamin Appl (22/05, Schloss Münchweiler) qui donne une soirée dédiée au Lied où se croisent des pages de Schubert, Strauss, Wolf et Grieg. Quant à la Deutsche Radio Philharmonie Saarbrücken Kaiserslautern (23/05, Großer Sendesaal des SR, Sarrebruck), c’est carrément un voyage autour de la planète auquel elle nous convie, avec notamment la création mondiale des Evocaciones du Colombien Carlos Cardenas. S’il est impossible de détailler ici un programme d’une belle ampleur, il est tout aussi impossible de ne pas évoquer le City of Birmingham Symphony Orchestra (10/05, Theater am Ring, Sarrelouis). Sous la baguette de Kazuki Yamada, chef aussi précis qu’enthousiasmant, se déploie une soirée 100 % française, portée par l’énergie du violoncelliste virtuose Kian Soltani : Berlioz, Saint-Saëns (son Concerto pour violoncelle n° 1 d’une transparence, d’une clarté et d’une élégance incroyable) et Fauré, dont l’Élégie pour violoncelle est pétrie d’une tristesse terriblement humaine… Enfin, les deux suites tirées du ballet Daphnis et Chloé de Ravel forment une fresque musicale qui a la semblance d’une plongée au coeur d’une Grèce idéale, celle, pastorale, des peintres français de la fin du XVIIIe siècle.
À Sarrebruck et dans toute la région du 8 mai au 29 juin
musikfestspielesaar.de
> Le festival se prolonge à l’automne autour du Jour de l’Unité allemande (03 & 04/10)