Je suis sang

À Metz, Paul-Émile Fourny crée Charly 9, adaptation théâtrale du roman éponyme de Jean Teulé retraçant la plongée dans la folie, pathétique et grotesque, du souverain qui ordonna le massacre de la Saint-Barthélémy.

Lorsque le metteur en scène Paul-Émile Fourny découvre Charly 9, c’est un véritable « coup de foudre. Pour moi, cette verve est très proche d’une écriture théâtrale », explique le directeur de l’Opéra-Théâtre Metz Métropole. Séduit par cette « truculence et cette modernité » ainsi que par l’originalité du sujet, il décide aussitôt de porter le roman à la scène. Signée Sébastien Lenglet, l’adaptation respecte la structure et le rythme d’un texte dont le protagoniste principal est Charles IX, le « roi de la loose » pour Jean Teulé qui a préféré nommer son roman Charly 9 afin de « donner un ton décalé à cette histoire tragique ». Son court règne fut en effet un des plus calamiteux de l’histoire de France : le jeune homme de 21 ans qui vient de monter sur le trône – sans y être préparé, ni destiné – prend la décision d’ordonner le massacre de la Saint-Barthélémy téléguidé par sa mère Catherine de Médicis et ses conseillers. Le 24 août 1572, des milliers de protestants sont exécutés et leur cadavres jetés à la Seine : « Des témoins affirment qu’il était possible de traverser le fleuve à pied » rajoute l’écrivain.

Ici, cette nuit tragique est passée à l’as : après un prologue décrivant la réunion des comploteurs, au plus haut sommet du Royaume, qui aboutit à la tuerie (ou comment un brave type influençable et un peu paumé devient un boucher), on passe aux conséquences qu’elle aura sur son ordonnateur : « Assommé par la monstruosité de son crime, Charles IX plonge dans la folie, multipliant les extravagances sanguinaires », chassant, par exemple, un cerf dans les couloirs du palais. « Il va mourir deux ans après, accablé par le poids de l’horreur qu’il a commise », résume Paul-Émile Fourny. Et son agonie sera terrible. Atteint d’hématidrose, il sue du sang, « réminiscence, pour lui, de ses crimes passés ». Réflexion sur le pouvoir, la folie et les délires meurtriers où peuvent mener les religions, la pièce est éminemment actuelle. C’est dans cette voie que s’est engagé le metteur en scène, respectant néanmoins le caractère historique du sujet, « impossible à gommer » : nous voilà dans un entre deux très réussi avec des décors dans lesquels on peut reconnaitre le Louvre, mais où la contemporanéité est inscrite grâce à des projections et des costumes d’époque traités de manière actuelle.

À Metz, à l’Opéra-Théâtre, du 13 au 18 avril

03 87 15 60 60 – www.opera.metzmetropole.fr

À lire

Le roman de Jean Teulé est publié chez Julliard (19,50 €) – www.julliard.fr

 

 

 

 

 

Une très belle adaptation en bande dessinée a été réalisée par Richard Guérineau chez Delcourt (16,95 €) – www.editions-delcourt.fr

 

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