Bonne idEx

Illustration de Fanny Walz Pour Poly

L’Université de Strasbourg a récemment été reconnue Pôle d’excellence, se voyant allouer des crédits importants. IdEx, LabEx EquipEx… Qu’est-ce qui se cache derrière ces mystérieux sigles ? Éléments de réponse et illustration par l’exemple avec le Groupe de recherches expérimentales sur l’acte musical.

Dans le cadre du Grand emprunt finançant les investissements d’avenir, l’État a souhaité, en 2010, « distinguer et soutenir un petit nombre de pôles d’excellence en France qui aient la pointure internationale », explique le Président de l’Université de Strasbourg, Alain Beretz. De là sont nées les Initiatives d’excellence (IdEx). À la fois label et financements, elles placent huit sites sur le devant de la scène. Strasbourg, avec ses 42 000 étudiants, a fait partie de la première vague, se voyant allouer 750 millions d’euros – presque le milliard espéré – qui « constituent un capital. Cet argent sera placé et nous pourrons utiliser les revenus de 3 à 3,5 % annuels », précise néanmoins Guy-René Perrin, Délégué général aux investissements d’avenir.

Initiatives pluridisciplinaires Il ne s’agit pas simplement d’allouer des sommes d’argent à tel ou tel laboratoire de pointe, mais de « créer des boîtes à outils répondant aux attentes d’une Université de rang international au vint-et-unième siècle dans la formation, la recherche, les relations avec la société ou le monde économique », revendique Alain Beretz dans une « vision transversale ». L’objectif ? Devenir une des vingt universités majeures en Europe, et pas seulement grimper de manière illusoire dans le classement de Shanghai, « un artefact un brin artificiel qui ne correspond pas, souvent, à la vraie valeur des sites, car il prend presque essentiellement en compte les hard sciences au détriment du droit, de la littérature, de la sociologie… et surévalue l’importance des Prix Nobel. » Guy-René Perrin précise : « Réussir, pour nous, signifie augmenter significativement, en cinq ou dix ans, la capacité d’attraction de l’Université. » Dans le cadre général de l’IdEx, ont été distingués seize Laboratoires d’excellence (LabEx), qui rassemblent les meilleures équipes autour de projets scientifiques novateurs jouant la carte de l’interdisciplinarité, une des marques de fabrique de l’Unistra. Onze Équipements d’excellence (EquipEx) complètent le dispositif à Strasbourg. Alain Beretz résume les interactions entre les différents éléments avec la « métaphore de la maison. Les LabEx et les EquipEx sont les briques de l’édifice, ses éléments constitutifs, tandis que l’IdEx est à la fois le plan global et les éléments de cohérence de l’ensemble, ceux qui en font un lieu de vie. »

Exemple musical Parmi les LabEx strasbourgeois, certains se consacrent à la biologie intégrative, d’autres aux réseaux d’ARN (Acide ribonucléique, une molécule synthétisée dans les cellules à partir d’une matrice d’ADN dont il est une copie) régulateurs en réponse aux stress biotiques et abiotiques… Peu de sciences humaines – une situation comparable au reste de la France – si ce n’est le Groupe de recherches expérimentales sur l’acte musical (Gream). Rassemblant treize enseignants-chercheurs, quinze doctorants rattachés et sept jeunes chercheurs, il est un « reflet de la force de l’Université de Strasbourg, sa pluridisciplinarité vécue au quotidien » pour son directeur Pierre Michel. S’il regroupe principalement des chercheurs en musicologie, il est ouvert à toutes les disciplines : philosophie, mathématiques, anthropologie ou littérature comparée. Son objet est de travailler sur une vision renouvelée de la musique qui prenne pour centre et pivot « l’acte musical, c’est-à-dire l’instant de la création au cours duquel l’interprète, dans une double relation consciente, s’approprie l’objet qu’est la partition – ou le codage laissé par le compositeur – pour le communiquer à l’auditeur. » Dans ses activités, le Gream ne connaît aucune frontière, ni stylistique (des musiques anciennes au rock, en passant par Wagner ou Ligeti), ni géographique, une partie de ses activités étant dédiée aux répertoires du bassin méditerranéen. Le travail du laboratoire se déploie sur trois axes majeurs, l’édition et l’étude de textes fondamentaux, une réflexion sur l’esthétique – ce qui reste de l’œuvre musicale après audition, notamment – et une autre sur les mécanismes de perception. Les moyens nouveaux (deux millions d’euros) permettront de mieux diffuser les recherches « auprès des spécialistes et du grand public auquel, dans le domaine qui est le nôtre, il est primordial de s’adresser ». En témoigne une manifestation organisée, en collaboration avec le Conservatoire de Strasbourg, un complice du Gream, autour du compositeur Gilbert Amy.

 

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