La valse à trois temps

Photo de Kurt Van der Elst

Menuet consiste en la répétition d’une même histoire trois fois, vue sous des angles différents. À partir du roman de Boon, le compositeur Daan Janssens et le metteur en scène Fabrice Murgia ont créé une tragédie intimiste.

«Je ne connaissais pas Louis Paul Boon, écrivain belge s’exprimant en néerlandais », admet le metteur en scène Fabrice Murgia : « Lorsque le compositeur Daan Janssens m’a passé son roman Menuet, j’ai été subjugué par un auteur de la trempe d’Hugo Claus¹. » Scrupuleusement respectée par le metteur en scène, la trame narrative ressemble à une valse à trois temps faite d’autant de monologues narrant la même histoire prenant, chacun, un point de vue différent : celui d’un homme travaillant dans une cave frigori que, de sa femme, devenue une ménagère dont il se désintéresse de plus en plus, et d’une très jeune bonne qui l’excite. Rappelant les protagonistes de plusieurs de ses précédentes pièces, Ghost Road² ou Exils, ces personnages « sont dans une profonde solitude au milieu de la société. Le sort de chacun se joue dans un court moment de vie. Ils se livrent à une introspection, plongeant au plus profond de leur être, en explorant les recoins les plus sombres. » Sur ces trajectoires humaines – avec une dramaturgie signée de la directrice du Maillon Barbara Engelhardt –, Daan Janssens a composé une partition où les voix chantées expriment les monologues intérieurs, dans laquelle il mêle des instruments aux sonorités graves (haut- bois, contrebasse, etc.) à quelques touches électroniques.

Photo de Kurt Van der Elst

« Menuet débute avec l’histoire de l’homme. Elle se répète avec un autre point de vue. Chaque fois, des éléments d’information nouveaux sont apportés aux spectateurs », explique Fabrice Murgia pour qui l’enjeu a été de rendre cette histoire à trois reprises : « Les ambiances sont différentes, le décor change avec la perspective. L’homme, par exemple, est assis sur son canapé et n’en bouge guère. » La vidéo ponctue les scènes faisant découvrir des êtres évoluant « aux frontières de la normalités. Leurs discours chantés sont des perceptions intérieures. On découvre ainsi un type attiré par les faits divers morbides et collectionnant les coupures de journaux. D’une certaine manière cela le remet dans une norme : constater que son voisin a tué quelqu’un et l’a découpé en morceaux lui fait penser qu’il est lui-même normal. »

 Au Maillon-Wacken (Strasbourg), mercredi 14 et jeudi 15 mars

maillon.eu

Au Grand Théâtre (Luxembourg), mardi 20 et mercredi 21 mars

theatres.lu 

1 Un des plus grands écrivains d’outre-Quiévrain à qui l’on doit notamment Le Chagrin des Belges. Lire Mort d’un vieux lion solitaire dans Poly n°132 ou sur poly.fr

2 Voir Poly n°155 ou sur poly.fr. Lisez d’autres papiers sur des pièces de Fabrice Murgia, Le Chagrin des ogres (Poly n°133), Daral Shaga (Poly n°171) et Children of nowhere (Poly n°177)

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