Paysages intranquilles

Rassemblant plus de 70 tableaux de Max Beckmann autour du thème du paysage, le Kunstmuseum de Bâle permet de découvrir la trajectoire artistique d’un “moderne” majeur.

L’année 2011 serait-elle celle de Max Beckmann (1884-1950) en terre germanique ? Aucun anniversaire marquant n’est à l’ordre du jour, et pourtant trois expositions d’importance s’ouvrent cet automne. À Bâle, la première est dédiée aux paysages. La seconde, à Leipzig (cité natale du peintre), est consacrée au portrait tandis que la dernière, à Francfort, se concentre sur la période américaine d’un homme qui passa les trois dernières années de sa vie aux États-Unis. Voilà l’occasion rêvée de (re)découvrir la singularité d’un artiste qui n’appartint à aucun groupe (mis à part la Berliner Freie Sezession dont il est un des fondateurs en 1914), même s’il fut imprégné par bien des courants, qu’il s’en approche – impressionnisme, expressionisme, Nouvelle Objectivité… – ou qu’il les refuse, comme l’abstraction. Dans un article, Pensées sur l’art temporel et intemporel, il écrit en effet : « Une chose est récurrente en tout art. C’est la sensibilité artistique, liée au caractère figuratif et objectif des objets à représenter. » S’il est considéré comme un des “modernes” les plus influents, lui se voyait comme le continuateur du classicisme, choisissant d’explorer les genres les plus traditionnels : nus, scènes mythologiques, natures mortes et, bien évidemment, paysages.

À Bâle, ces derniers reflètent l’évolution d’une création profondément enchâssée dans son siècle. Formes arrondies et couleurs lumineuses : nous sommes au début des années 1920 et Das Nizza in Frankfurt am Main ressemble à un ilot de calme. Une apparence seulement : des éléments dérangeants – barrière, panneau “Halt” – viennent troubler la quiétude. Il n’y a généralement rien de tranquille, ni de paisible dans les paysages de Beckmann. Dans ses tableaux, aux teintes de plus en plus sourdes, on sent monter la chape de plomb du nazisme que l’artiste va fuir : en 1937, une dizaine de ses œuvres figurent dans l’exposition dédiée à l’art “dégénéré” à Munich. Il part pour un exil définitif : Paris, Amsterdam… En Hollande, il peint d’après ses souvenirs – et des cartes postales – des vues, parmi les plus saisissantes, de la Côte d’azur et montre que la “french Riviera” peut être d’une intense tristesse. Même sous le soleil.

À Bâle, au Kunstmuseum, jusqu’au 22 janvier 2012

+41 61 206 62 62 – www.kunstmuseumbasel.ch

Max Beckmann, Face à face au Museum der bildenden Künste de Leipzig, jusqu’au 22 janvier 2012 – www.mdbk.de

Max Beckmann et l’Amérique au Städel Museum de Francfort, du 7 octobre au 8 janvier 2012 – www.staedelmuseum.de

 

 

 

vous pourriez aussi aimer