Les Scènes sauvages et leurs nouveaux mondes

Les Scènes sauvages, représentation de la pièce "Une République" © Pierre Rich

Pour sa 5e édition, Les Scènes sauvages, festival de théâtre niché au cœur de la Vallée de la Bruche, crée deux pièces réunissant l’ensemble de son équipe, comme une utopie rurale défiant les crises.

Depuis une poignée d’années, une bande de comédiens fait de cette vallée alsacienne s’enfonçant dans les Vosges un lieu d’expérimentation théâtrale, de rencontres et d’ateliers tout au long de l’année avec les établissements scolaires. À l’orée de l’été, ils prennent leurs quartiers pour un mois et demi de résidence de travail afin de finaliser tout ce qui permet de donner vie au festival et à la participation des amateurs sur l’une ou l’autre création maison. Malgré la mauvaise surprise d’une baisse de subvention de la Drac d’un-tiers (soit 5 000 €), tombée mi-avril, Charles Zévaco n’entend pas baisser les bras, « même si ce soutien en berne reste peu compréhensible par rapport à notre investissement sur le territoire avec les habitants, en sus des créations et de la vitalité culturelle que nous apportons dans un coin qui en est dépourvu. » Le directeur du festival assure qu’ils « trouveront des solutions afin de ne pas annuler des spectacles pour lesquels [nous] sommes déjà engagés, quitte à rogner sur le budget de l’an prochain et nous serrer la ceinture sur les consommables. Nous prenons de plein fouet l’inflation, multipliant les prêts et le recours à l’économie alternative en lien, par exemple, avec Emmaüs. Cela permet d’aider, mais en aucun cas de fonder à long terme. » Heureusement prévoyant, il n’y a dans la programmation que deux créations au lieu de trois ou quatre habituellement.

Les Scènes sauvages © Pierre Rich
Les Scènes sauvages © Pierre Rich

La première est l’adaptation de Festen (01-08/07, Waldersbach), premier film tourné selon la doctrine du Dogme95. Un manifeste signé cette même année par plusieurs réalisateurs danois, Thomas Vinterberg et Lars von Trier en tête, en opposition radicale à l’esthétique hollywoodienne et aux avant-gardes passées. Une table de réception est dressée (dans le jardin de la Maison Fritz Stephan) pour accueillir le repas d’anniversaire organisé pour les 60 ans du patriarche de la famille de Christian, revenu de l’étranger pour l’occasion. Une dizaine d’amateurs (jouant notamment le père, la mère et les convives) se mêlent aux professionnels pour ce qui tourne au règlement de compte sur fond de révélations de secrets, d’inceste, de racisme, de misogynie, de mépris de classe et de silence complice. Débutant juste avant la tombée de la nuit, la pièce multiplie les points de vue grâce à la diffusion d’images tournées en direct au téléphone portable, à l’intérieur de la bâtisse. Ces gros plans vidéo, au plus près de l’action, forment autant d’allers-retours possibles entre ce qui est donné à voir et ce qui est caché, ce qui est de l’ordre de la vérité et du non-dit. La seconde création est l’adaptation par Nathan Bernat du roman de Giono Deux Cavaliers de l’orage (02-08/07, étable communale de Wildersbach). Dans une longue nuit, quatre femmes attendent quelqu’un qui n’arrive pas et s’inquiètent en faisant… du saucisson ! Le destin de deux frères, fusionnels et rivaux, est en jeu dans une langue puissante évoquant la violence de la nature et sa beauté foisonnante.


Dans la Vallée de la Bruche du 30 juin au 9 juillet
les-scenes-sauvages.com

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