La vie des bêtes

Alfred Kubin, Le Charmeur de serpents, Saarlandmuseum – Moderne Galerie Saarbrücken, Stiftung Saarländischer Kulturbesitz © VG Bild- Kunst, Bonn 2019 Photo : Stiftung Saarländischer Kulturbesitz

Dédié au jeune public, L’Animal en images rassemble 75 oeuvres issues du fonds de la Moderne Galerie de Sarrebruck : hiboux, vaches, dromadaires et autres ours composent une belle farandole.

Sous-titrée De Beau à terrifiant, cette exposition présente une sélection d’oeuvres sur papier – dessins, gravures, etc. –, de sculptures et de photographies accrochées à hauteur de bout’chou. Les adultes se baisseront ainsi pour observer un bestiaire artistique du XXe siècle, le parcourant avec leurs enfants et Eli le bourdon, héros d’un livret-jeu (disponible en français) invitant le visiteur à dessiner, observer, réfléchir ou encore colorier. C’est ainsi qu’il pourra parer de mille et une couleurs le mignonnet ourson dressé sur ses pattes arrière signé Renée Sintenis, artiste allemande dont les représentations animales sont célèbres : avec cette silhouette aux contours simples, elle réussit en quelques traits à générer une grande émotion. Autre plantigrade arpentant les salles de la Moderne Galerie, un charmant bronze de Fritz Koelle, plus connu pour ses statues de travailleurs. Organisée thématiquement (bestioles volantes, aquatiques, fabuleuses, etc.), cette présentation interactive – grâce à des caissons installés sous les oeuvres – permet de découvrir un chouette hibou sortie des contes de Grimm d’Albert Weisgerber mais aussi plusieurs oeuvres d’Alfred Kubin, membre du Blaue Reiter1 dont toute l’oeuvre est marquée du sceau de l’onirisme et du surnaturel. Entre cauchemar et réalité se déploie un monde obscur, dérangeant et attirant à la fois, qui renvoie tout autant à Poe, Goya, Bosch ou Meyrink qu’aux premières découvertes de la psychanalyse : en témoigne une sombre gouache représentant un charmeur de serpents dans laquelle un homme souffle avec force dans son pungi, entouré par quatre cobras ondoyant avec grande élégance. Tous les animaux ne sont cependant pas aussi menaçants. Illustration avec deux zèbres impavides posés sur une lithographie de Fritz Winkler, un relief sixties montrant de paisibles vaches sous l’averse d’Emy Roeder – dont la géniale Femme enceinte fut accrochée dans l’exposition Entartete Kunst (Art dégénéré) de Munich, en 1937 ce qui poussa son auteur à l’exil – ou encore une composition aux accents abstraits d’Edgar Jené évoquant une poule et ses poussins. Toutes ces oeuvres éveillent la curiosité des enfants et excitent le regard des adultes, comme un pastel réalisé par Max Slevogt en 1905 (auquel l’institution sarroise consacra une récente et passionnante rétrospective2) figurant une dompteuse glamour au look très Belle époque, faisant tournoyer d’un fouet expert une troupe de lions sur la piste d’un cirque.


À la Moderne Galerie (Saarbrücken), jusqu’au 28 juillet (entrée gratuite pour les moins de 18 ans)

kulturbesitz.de

1 Voir Poly n°194 

2 Voir Poly n°213 

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