Kafka dans le visage

© Natalia Kabanow

Lorsqu’un grand maître du théâtre – pour ne pas dire LE grand maître – rencontre un chef-d’œuvre de la littérature, on obtient une pièce grandiose. Le Procès kafkaïen de Krystian Lupa étrille le conservatisme de Jarosław Kaczyński, dirigeant depuis 2015 la Pologne d’une main de fer avec son parti Droit et Justice. En des scènes hallucinées, proche d’un surréalisme sombre, Joseph K. est arrêté, sans aucune idée de quoi on l’accuse. Il entre dans un labyrinthique entrelacs d’arbitraire où l’on menace par la force, tente d’arracher des aveux par la peur et règne par l’aveuglement et la soumission.

La part d’ombre angoissante de Kafka se reflète dans une scénographie de pièces aux murs flottants, dont la lumière blafarde révèlera la profondeur et la juxtaposition. Joseph K. lui-même est dédoublé, deux comédiens interprétant diverses facettes de sa personnalité. Au centre de ce roman inachevé, Lupa crée un face à face entre Kafka et un groupe d’amis, notamment proche de Felice Bauer, sa fiancée dont la rupture entraîna la rédaction de l’œuvre. Le groupe, vaille que vaille demeure debout, en lutte avec ce miroir direct du climat populiste polonais actuel. (I.S.)


 

À la Filature (Mulhouse), samedi 15 décembre (dès 15 ans, en polonais surtitré en français)

lafilature.org

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