Garden partys

Photo d'André Muller

Face aux courts-circuits induits par la Covid-19, la Comédie de Colmar se lance dans des Circuits-courts : la production de trois petites formes jouables partout s’appuyant sur les artistes maison.

À la CDC comme ailleurs, le retour à l’activité passait par des retrou- vailles. Celle des équipes travaillant au théâtre « devenu totalement sinistre une fois ses acteurs au quotidien partis en confinement », confie Matthieu Cruciani, co-directeur des lieux. « J’avais l’impression, lorsque j’y passais, de pénétrer dans une cathédrale vide, abandonnée. L’idée a très vite germé, lorsque les perspectives d’y revenir avec toutes les précautions sanitaires requises se sont confirmées, de se retrouver avec nos artistes associés1 et notre collectif artistique2. De créer trois courts solos à jouer en extérieur que nous montons avec eux dans un moment de travail précieux qui nous avait terriblement manqué. » Dès juillet, Catherine Umbdenstock a proposé un collage de textes de Tomi Ungerer, Otto & autres contes. Le temps pour Simon Delétang de s’atteler à Construire un feu avec Paul Schirck. Cette nouvelle de Jack London, peut-être la plus célèbre, confronte un jeune homme à l’irrémédiable force de la nature et au besoin d’anti-individualisme. Une sorte d’Into The Wild dénué de poussée aux nues d’un vagabond céleste mythifié façon Sean Penn. London ne cherche pas à séduire, son monde est glaçant et dangereux. Quant à Matthieu Cruciani, il confie à Juliette Steiner l’interprétation de L’Occupation des sols de Jean Echenoz. Seize pages cocasses avec « un côté cruel et froidement goguenard » racontant l’histoire d’un homme et de son fils, dont l’épouse et mère a disparu dans un incendie ayant emporté tout souvenir. Son portrait peint sur un immeuble en rénovation pour une publicité demeure la seule image qu’ils en conservent. Son lent effritement devient prétexte à une réflexion sur la disparition. David Séchaud signe la scénographie : une charrette d’architecte contenant tout le bric-à-brac nécessaire pour bâtir et reconstituer ce portrait avec bâches et tasseaux. « Ce petit bijou littéraire évoque la finitude et la mortalité au cœur de nos villes, ce mélange de respiration humaine, à la fois belle et désespérante de chantier permanent » assure le metteur en scène. « Echenoz déploie quelque chose de plastique dans une énigme de la langue délicieuse. » À ces trois propositions s’ajoute l’accueil de Capuche, aventure intérieure de Victoria Belen Martinez. Un solo circassien mêlant danse et marionnettes autour de l’envie de disparaître. « Nous parions sur l’itinérance, déjà très présente dans notre saison à venir. Nous allons au-devant des gens, pour créer du désir, en espérant les retrouver nombreux, au jardin, puis au théâtre. »


Dans les cours d’école, Ehpads, associations, jardins familiaux ou à la Comédie de Colmar, en septembre et octobre (gratuit sur réservation, à partir d’une jauge de 5 personnes)
comedie-colmar.com

Une intégrale sera donnée à la CDC à une date encore inconnue à l’heure où nous écrivons ces lignes, rendez-vous sur comedie-colmar.com

1 Alice Laloy et Catherine Umbdenstock sont les deux artistes associées de la CDC
2 Le collectif se compose de Juliette Steiner, Paul Schirck, David Séchaud et Pierre Maillet

 

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