French connection

Ernest Meissonier, 1814,1864, Musée d’Orsay, Paris

Passionnante exploration de La Peinture française entre 1820 et 1880, cette exposition rassemble des artistes célèbres et célébrés en leur temps, mais aujourd’hui méconnus. Et réciproquement.

Que sont dans l’Histoire de l’Art les stars du Salon devenues ? L’institution décidait des contours de l’Art officiel au XIXe siècle, faisant et défaisant réputations et fortunes, portant au pinacle des artistes désormais oubliés. Qui se souvient du réalisme historique d’Ernest Meissonier (en 1890, Campagne de France, 1814 est le tableau le plus cher jamais vendu d’un peintre vivant dans le pays), de l’académisme d’Alexandre Cabanel ou encore de la maestria glamour du très people Eugène Giraud, proche de Mathilde Bonaparte (avec un éclatant Bal de l’Opéra, ici redécouvert) ? Ceux qui ont traversé le temps sont à chercher du côté du Salon des refusés, créé en 1863 – brillant one shot avant le Salon des indépendants de 1884 – sous l’impulsion de Manet qui y montre Le Déjeuner sur l’herbe. L’exposition zurichoise permet néanmoins de dépasser avec finesse cette dichotomie caricaturale qui s’est installée dans les esprits au fil des années, rappelant que nombre d’artistes “officiels” étaient plus novateurs qu’on l’imagine : le portrait d’un Napoléon matois et inquiétant signé Paul Delaroche en est une belle illustration.

Gustave Courbet, 1862, The Metropolitan Museum of Art, New York, H. O. Havemeyer Collection (legs de Mrs. H. O. Havemeyer, 1929)

 

Organisée thématiquement (Le Corps érotisé, Les Représentations de la nature : entre idéal et réalité, etc.), l’exposition est une promenade dans la peinture française du XIXe siècle, Acclamée & Brocardée – pour reprendre son sous-titre – où se déploie notamment l’orientalisme de Delacroix (sa Chasse aux lions inspirée de Rubens). Il éclaboussa de son talent le Salon de 1822 avec La Barque de Dante, faisant voler en éclats les canons d’un néo-classicisme rigide incarné par Ingres dont le Kunsthaus présente le hiératique portrait d’un officier de l’armée de Bonaparte, Hippolyte-François Devillers. Dans ce tableau proche de la perfection, à la surface impeccablement lisse, se manifeste sa passion pour les détails (notamment vestimentaires) et les influences de la Renaissance italienne. Gustave Courbet s’oppose, lui aussi, à Ingres dans La Source reprenant le titre et le sujet d’une de ses toiles : alors que ce dernier a classiquement représenté une jeune femme nue de face, devant une cascade, il choisit de la placer de dos dans une composition réaliste au doux érotisme. Au fil des salles, on croise aussi Manet (Les Hirondelles refusé au Salon de 1874), Pissarro (dans Bords de l’Oise près de Pontoise, paysage impressionniste où émergent des cheminées d’usine dans le calme de la campagne), Moreau (Diomède dévoré par ses chevaux au romantisme maniériste nourri de Vinci, Michel-Ange et Piranèse) ou encore Monet avec le très sensible Sur la plage à Trouville représentant avec douceur le premier amour du peintre, Camille Doncieux.

Au Kunsthaus Zürich, jusqu’au 28 janvier 2018
kunsthaus.ch

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