Drive my (Hijâz) Car

L’Hijâz’Car, groupe évoluant entre jazz occidental et musiques d’Orient, écriture et impro, concocte un nouveau répertoire… plus sombre. Incursion au Cheval Blanc, durant une répétition.

Étrange Noël… Pas de Jingle bells, mais une langoureuse musique méditerranéenne s’échappant du toit blanchi par le givre de la salle schilikoise, en cette fin d’année 2011. Gregory Dargent (oud, un luth oriental), Nicolas Beck (tarhu, sorte de violon), Etienne Gruel (percussions), Jean-Louis Marchand (clarinette basse) et, nouveau venu dans la formation, Vincent Posty (contrebasse), en résidence au Cheval Blanc, mettent au point les morceaux qu’ils y présenteront au public en janvier. Notes répétitives et jazzesques, moments nerveux, instants d’accalmie… puis, quelques secondes d’hésitation. « Faut qu’on lâche les chiens ! » balance Jean-Louis, déclenchant un long débat sur un satané “ré”, censé marquer le basculement de la phase écrite à l’improvisation. Amateurs de coups de gueule, passez votre chemin : les membres de L’Hijâz’Car, quasiment tous d’anciens du Conservatoire strasbourgeois, se connaissent depuis bien longtemps1. En douze ans d’existence et de tournées internationales, les membres du quintet, qui reviennent tout juste du Brésil2, ont appris à s’écouter. « Tout le monde compose et ramène des idées : quatre pages de partoches ou deux lignes de précisions d’arrangements. Les choses se font de manière fluide. On se recadre dans une confiance mutuelle » explique Gregory. « Nous jouons, creusons et fixons… mais pas pour l’éternité car nos compositions restent en mouvement » précise Jean-Louis. Chacun, avec ses références artistiques, sa culture et son background, apporte des « lignes directrices esthétiques », sa pierre à l’édification d’un répertoire musical neuf qui aboutira à une série de concerts et l’enregistrement d’un disque.

Leurs influences vont du compositeur libanais Rabih Abou-Khalil à la musique traditionnelle turque, de Stravinsky à Chostakovitch. Loin des jolis airs « qui font rêver de tapis volants ou de châteaux dans le Sahara », les récentes compos de L’Hijâz’ sont tendues, sombres. Moins “pittoresques”. « Nous perdons ce regard “ethnique” sur les musiques d’Orient. Le groupe est plus proche du rapport dynamique présent dans les quatuors à cordes qui peuvent être très narratifs avant d’“envoyer” » analyse Grégory Dargent. Les actuels remous dans le monde arabe – où ils se rendent régulièrement – ont-ils eu un impact sur leurs créations développant des ambiances dark et dérangées ? Forcément… « Un des morceaux a été écrit en pensant à Kadhafi qui hurlait un interminable discours avant de repartir avec sa voiture de golf électrique blindée. Hallucinant ! » Pour l’heure, les musiciens alignent des rythmiques « violentes et dramatiques », des thèmes à tiroirs et quelques mélodies « qui tuent ». Reste à monter l’ensemble, à ciseler et polir. « On aime quand c’est fin. »

1 Ils jouent tous dans d’autres formations de L’Assoce Pikante (voir Poly n°123), structure qui se charge de L’Hijâz’, mais aussi de Maliétès, Boya ou Electrik GEM – www.myspace.com/lassocepikante

2 L’Hijâz’Car y a joué en compagnie de la chanteuse algérienne Houria Aïchi avec laquelle ils ont beaucoup tourné (Algérie, Norvège, Italie…) et enregistré un disque, Cavaliers de L’Aurès (Accords croisés)

À Schiltigheim, au Cheval Blanc, vendredi 20 et samedi 21 janvier

03 88 83 84 85 – www.ville-schiltigheim.fr

www.myspace.com/hijazcar


Photo : séance d’écoute de L’Hijâz’Car, durant les répétitions au Cheval Blanc (© Jean-Marie Guldner)

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