Dark Alix

Alix a vieilli : devenu quinquagénaire et sénateur romain, ses nouvelles aventures gagnent en noirceur et en profondeur. Le héros créé par Jacques Martin vit une nouvelle jeunesse.

Les personnages de bande dessinée demeurent la plupart du temps figés dans une éternelle jeunesse. Rare contre-exemple, Frank Margerin a fait évoluer Lucien avec lui : dans ses récents albums il ressemble ainsi à un quinqua bedonnant… Autre atmosphère dans cette nouvelle série parallèle à l’épopée de l’icône créée par Jacques Martin (1921-2010) en 1948, après les très pédagogiques Voyages d’Alix (plus de 30 albums parus à ce jour). Imaginé par une historienne diplômée de l’École des Chartes, Valérie Mangin (textes) et l’ancien décorateur de théâtre à la Comédie française, Thierry Démarez (dessins) – déjà auteurs du Dernier Troyen (six tomes parus chez Soleil) – Alix Senator met en effet en scène un respectable notable d’une cinquantaine d’années. On y découvre aussi ses deux fils : Titus et Khephren, le rejeton d’Enak en fait (mort en Égypte dans des circonstances à peine esquissées ; le pitch d’un futur album ?) qu’Alix a adopté. Pas de nouvelles de l’épouse du sénateur Gracchus cependant…

Nous sommes en 12 avant Jésus-Christ : les meurtres mystérieux de Marcus Aemilius Lepidus, grand pontife de Rome, et d’Agrippa, successeur désigné d’Auguste qui est alors empereur, mettent Rome en émoi. Alix est chargé d’enquêter sur des assassinats perpétrés par des aigles aux serres d’or… Grâce à l’intuition de ses enfants, il va plonger au cœur du mystère. Si l’intrigue tient la route et maintient le lecteur en haleine – cela faisait longtemps qu’on attendait ça chez un personnage que l’on aime profondément et qui nous avait beaucoup déçus récemment – le changement principal n’est pas là. Cette saga est en effet bien plus dure que les épisodes, trop mièvres, auxquels nous sommes accoutumés ces dernières années : les cadavres ont les entrailles à l’air, on participe à des orgies où les filles sont légères et le vin coule à flots… Ce n’est certes pas encore aussi noir que la série produite par HBO, Rome, mais l’influence de bandes dessinées comme Murena ou Les Aigles de Rome semble patente. Le dessin, lui aussi, se modifie, quittant la fluidité de la ligne claire, devenant plus rude et plus réaliste. Alix vieillit… et, comme les meilleurs vins, se bonifie.

Les Aigles de sang, volume 1 d’Alix Senator est paru chez Casterman (12,95 € ; une version de luxe, toilée et augmentée d’un cahier historique sur Auguste est également disponible pour 18,95 €)
www.casterman.com
www.alixsenator.com

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