Créateurs de créatures


Photo de Lucile Perron (Sauvages de Françoise Sablons)

À Toul, se croisent le geek art de Paul, alias Hector, et les êtres textiles étranges de sa mère, Françoise Sablons pour une exposition post-brut.

Nous avions laissé la famille Sablons au fin fond du Jura, au Vaudioux très précisément, minuscule village où mère et fils organisent chaque été, depuis 2002, des expositions dans leur galerie nommée Biz’Art-Biz’Art. Présentant essentiellement des œuvres d’art brut – signées, par exemple, du génial russe Sergey Bespamyatnykh – ils montrent également les leurs. Depuis la disparition de son époux Dominique en 2015, Françoise Sablons « n’arrive plus à dessiner, ni à peindre. Un blocage. Net », explique-t-elle. Exit donc ses bestioles post-pop à la complexion d’albâtre. Nouée à l’intérieur, elle crée des sculptures de cordes : en 2015 naissent les Sauvages, armada textile qui « renvoie à notre humanité première, mais aussi au besoin, exacerbé aujourd’hui, de dissimuler sa fragilité derrière des masques. » Évoquant des fétiches africains ou des statuettes primitives frustes venues du Néolithique, ils ont un air à la fois inquiétant et attirant : terne, terreux, leur silhouette asexuée les indifférencie, seuls leurs masques les individualise, indiquant leur statut d’êtres sociaux. Ils dialoguent avec les Ours faits de cordages noircis au bitume, version vaguement inquiétante de nos doudous d’enfance. Leur noir mat et poudré capte la lumière avec force, tandis que leurs yeux, deux perles de verre biscornues, la réfléchissent avec élégance.

Photo de Lucile Perron (Sauvages de Françoise Sablons)

En contrepoint, se déploient les œuvres de Paul Sablons, plus connu sous le pseudonyme d’Hector : encres sur papier aux rondeurs pop séduisantes et aux couleurs franches, et sculptures qu’il a nommées Cucus : « Quand je les ai créées, je me suis dit qu’on me ferait peut-être le reproche qu’elles sont “cucul la praline”, alors j’ai préféré mettre les pieds dans le plat de suite », s’amuse-t-il. Du bois découpé jaillit une silhouette reconnaissable au premier regard, avec ses grandes oreilles vaguement félines. Des centaines de personnages sont nés de la féconde imagination (et du travail précis et méticuleux) d’un artiste passionné par la mythologie et imprégné de culture geek. Se croisent figures chères aux enfants de toutes les époques (Casimir, Bécassine, Tarzan…), super-héros (Galactus, Wolverine, Elektra…) et autres icônes… jusqu’à Jésus !

Photo de Lucile Perron (Sauvages de Françoise Sablons)

À La Petite Boucherie (Toul), du 8 mars au 3 avril
lapetiteboucherie.fr

Françoise Sablons expose sa fresque monumentale de 25 mètres de long intitulée Tarzan Parade à la Cathédrale de Toul (01/08- 20/09)

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