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Fabrice Monteiro: Untitled #1, 2013. Aus der Serie „The Prophecy“ Copyright Foto: Fabrice Monteiro

Les entrailles de la Völklinger Hütte, monstre de fer tentaculaire, accueillent L’Afrique, vue par les photographes. Un pont entre patrimoine industriel du XIXe siècle, héritage et émancipation contemporaine.

Sortie de terre en 1873, sa silhouette habille toujours le paysage. La petite ville de Völklingen, située à quelques kilomètres de Forbach et de Sarrebruck, a longtemps battu au rythme et au son assommant de ce paquebot de métal échoué dans la plaine. Avec ses six hauts-fourneaux reliés par la plateforme du gueulard culminant à 45 mètres du sol, la monumentale aciérie sarroise ne cesse de fasciner. Figée dans le temps, celle qui était le poumon économique de toute la région frontalière symbolise aussi bien le développement industriel flamboyant de la fin du XIXe siècle qu’un travail harassant broyant les hommes au XXe siècle. Plus de 600 000 m2 de béton brut et de tuyauteries sont conservés, inscrits sur la liste du Patrimoine culturel mondial de l’Unesco. Un témoin tout à la fois du génie et de la déraison de l’Homme envahit le visiteur qui pénètre en ces murs où travaillaient quelques 17 000 ouvriers allemands, mais aussi français du bassin lorrain voisin, avant sa fermeture en 1986. Plus qu’un musée, le site témoigne du quotidien des cols bleus oscillant entre fumée et martèlement pour créer, dans une chaleur folle, de la fonte. Si le fleuron sidérurgique a baissé pavillon, l’ancienne salle de mélange, véritable ventre du lieu où étaient stockées et convoyées les matières premières, sert aujourd’hui de salle d’exposition pour artistes de renommée internationale et jeunes pousses, notamment lors de l’UrbanArt Biennale1. Shepard Fairey, Liu Bolin, Banksy, Cope2, JonOne, Levalet ou encore Vhils y ont proposé des œuvres, parfois in-situ, dont demeurent parfois des traces d’une édition à l’autre. Pour les découvrir, ne manquez pas de traverser l’ensemble du complexe industriel jusqu’au “Paradis”, le clou du spectacle où la nature a totalement repris ses droits. Un nom teinté d’ironie pour l’ancienne cokerie (transformation et enrichissement de la houille) : l’environnement de travail le plus éprouvant, un véritable enfer entre chaleur, poussière et feu.

Cette année, au milieu des murs de béton armé, neufs photographes africains racontent leur continent avec des clichés de très grand format. Fabrice Monteiro2 offre des visions apocalyptiques de personnages mutants vêtus de costumes-déchets au milieu d’une décharge à ciel ouvert ou de sirène pétroléifiée émergeant de flots souillés par un tanker échoué au loin. Le marocain Yoriyas remplace le mythe cinématographique de sa ville natale Casablanca par des photos aussi grinçantes qu’un Martin Parr quand Kibuuka Mukisa Oscar portraiture des breakdancers ougandais au milieu de marchés et voies ferrées, preuve de la vitalité de l’art, s’immisçant dans toutes les activités humaines.


Au Patrimoine mondial Völklinger Hütte (Völklingen)
voelklinger-huette.org

L’Afrique – Vue par les photographes, jusqu’au 1er novembre et visite en 3D sur voelklinger-huette-afrika.org

1 Voir nos différents articles dans Poly n°222, n°217 & n°197 ou sur poly.fr
2 Lire Africa is the future autour de Making Africa, exposition du Vitra Design Museum dans Poly n°175 ou sur poly.fr

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