> > > > > > > > > > > > > > > > >
Abonnez-vous !
< < < < < < < < < < < < < < < < < < < < < <

Stéphane Braunschweig signe une sublime Andromaque au TnS

© Simon Gosselin

Stéphane Braunschweig continue d’adapter l’œuvre de Racine en s’attaquant à Andromaque, tragédie mythologique prenant place un an après la guerre de Troie.

Après Britannicus (2016), récit retraçant la prise de pouvoir du sanglant empereur Néron, et Iphigénie (2020), qui se concentre sur les événements ayant conduit à la guerre de Troie, Stéphane Braunschweig monte une autre pièce de Racine où amour et conflit ne cessent de s’entrechoquer. Avec Andromaque, l’ancien directeur du TnS révèle toute l’étendue de la souffrance des personnages : pour lui, leurs traumas ne sont pas simplement l’écho de rivalités passionnelles, mais une conséquence directe de la guerre et des atrocités qu’ils ont vécues. Dans un décor dépouillé où se détache une fascinante et gigantesque mare de sang, il retranscrit l’incapacité de tous ces amants maudits à se remettre des horreurs des combats. Si Oreste, frère d’Iphigénie et fils du chef grec Agamemnon, aime Hermione, fille de la légendaire Hélène, celle-ci aime Pyrrhus, fils d’Achille, qui aime Andromaque, épouse d’Hector… lui-même terrassé par Pyrrhus. Au milieu de cet imbroglio de sentiments, tout est lié et sujet à marchandage. La veuve de l’ancien général troyen ne le sait que trop bien, puisqu’elle devient la captive de Pyrrhus et tente, par tous les moyens, de sauver la vie de son jeune enfant.


Vêtus de tenues contemporaines, Oreste et Pyrrhus s’assoient autour d’une table blanche immaculée. Le premier, propre sur lui et impeccablement coiffé, relève une chaise renversée – métaphore de leurs dissensions sous-jacentes et à venir – et presse son interlocuteur de lui livrer le bébé  d’Andromaque, car après tout, « qui sait ce qu’un jour ce fils peut entreprendre ? ». Bien que le condamner à mort soit un motif de satisfaction pour la Grèce victorieuse, Pyrhhus, campé par un Alexandre Pallu belliqueux et moins soigné, s’y oppose en ce début de premier acte : « Dans le sang d’un enfant je me baigne à loisir ? Non, Seigneur. Que les Grecs cherchent quelque autre proie », lui oppose-t-il. Quand  Andromaque parait, la crinière fièrement attachée, cet homme épris lui assure un total soutien… mais derrière un altruisme de façade se découvre, bien vite, un chantage affectif – « Je défendrai sa vie aux dépens de mes jours. Mais parmi ces périls où je cours pour vous plaire, Me refuserez-vous un regard moins sévère ? ». Conseillés par leurs confidents, les protagonistes voguent sur des eaux troubles pour tenter de tirer leur épingle du jeu, manipulant l’affection de leurs pairs à leur avantage et se déchirant peu à peu entre passion, vengeance, dilemme et morale. En faisant  continuellement évoluer l’allure du quatuor principal – tantôt raffiné, débraillé ou couvert du liquide poisseux qui suinte sous leurs pieds –, Stéphane Braunschweig nous plonge au plus profond de leurs tourments, sublimant les alexandrins de Racine qui demeurent, aujourd’hui encore, brûlants d’actualité.


Au Théâtre national de Strasbourg du 3 au 18 décembre
tns.fr

> Rencontre avec l’équipe artistique à l’issue de la représentation du 13/12

vous pourriez aussi aimer