Scènes de ménage

© Mario del Curto

À quoi ressemble la vie quotidienne d’un couple d’acrobates ? Au meilleur et au pire, si l’on en croit le nouveau spectacle du Cirque Aïtal. L’improbable duo pratique un amour de haute voltige, dont l’humour est la clef de voûte.

Kati Pikkarainen et Victor Cathala se sont rencontrés au Centre national des Arts du cirque au début des années 2000. Depuis, ils sont partenaires sur scène et à la ville. Un couple comme tous les autres, mis à part un détail : lorsqu’ils s’envoient en l’air, ce n’est pas une métaphore. La voltigeuse et son porteur, excellent dans la technique de main-à-main (qu’ils développent depuis plus de dix ans), la métamorphosant en véritable langage des sentiments. Tout naturellement, l’envie leur est venue de transformer leur vie en spectacle, en y ajoutant des nouveautés comme les jeux icariens. Après La piste là, première création – et énorme succès – les voici dévoilant leur quotidien dans Pour le meilleur et pour le pire. Sur la piste en terre de leur chapiteau, le couple arrive au volant d’une vieille Simca rouge customisée… Comme l’annonce d’un road movie carrément à l’ouest sur les chemins tortueux de la vie à deux. La pétaradante guimbarde, troisième personnage du spectacle, se fait tour à tour maison, chambre nuptiale, vestiaire, débarras, tandis que l’autoradio balance une bande-son déjantée, où Noir Désir, AC/DC et les Clash sont revus à la sauce Aïtal.

Dans cette mise en scène clownesque, ce sont les portières qui claquent. Et les comptes se règlent à coups de manivelle. Surgissant de dessous le capot, telle une diablotine sortie de sa boîte, la minuscule Kati fait l’effet d’une brindille à côté du colosse Victor. Ce jubilatoire contraste n’est pas pour rien dans la réussite du duo : la blonde finlandaise et le brun toulousain jouent de leurs différences pour inventer des figures hilarantes. La jeune femme, par exemple, est  transformée en écharpe, enroulée autour du cou de son homme ou fait de la balançoire entre ses jambes. S’il faut une sacrée dose de confiance mutuelle dans l’acrobatie de main-à-main, le couple n’échappe pas aux scènes de ménage, qu’il élève même au rang d’art. Le quotidien, direz-vous ? Sauf qu’ici, on s’en va bouder au sommet d’un mât chinois bricolé à partir de pots d’échappement. Tout devient acrobatique avec ceux qui ne connaissent, pour s’exprimer, que le langage de la pirouette. Mais ce qu’ils ont à dire est si fort que leurs portés en deviennent époustouflants, et leur complicité procure au moins autant de frissons que leur performance technique. Parce qu’ils savent, sans complexes, rire du pire, Kati et Victor livrent ici le meilleur de leur vie de couple et d’artistes. C’est beau et sincère. C’est de l’amour.

À Offenbourg, au Kulturforum, sous chapiteau (présenté par Le Maillon et le Kulturbüro Offenburg), du 7 au 10 avril (Kulturbus gratuit depuis Strasbourg)
+49 781 82-2000 – www.kulturbuero.offenburg.de
03 88 27 61 81 – www.maillon.eu

À Forbach, au Carreau, sous chapiteau, du 16 au 18 avril
03 87 84 64 34 – www.carreau-forbach.com

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