Au pays des merveilles

Le jeune musicien messin Chapelier Fou, en concert lors du Festival des Artefacts, est loin de travailler du chapeau : ses compositions cérébrales sont de savantes fusions mêlant instrumentations acoustiques et bidouillages électroniques. Entretien.

Vous avez emprunté votre nom de scène à un personnage de Lewis Carroll…

Mon pseudo vient de mes premiers pas dans la musique électronique où j’utilisais des samples issus de disques de contes de fées, notamment la voix du Chapelier dans Alice. Je travaillais beaucoup sur le montage, créant des narrations sans queue ni tête.

Un des buts de votre musique est-il de mener l’auditeur “de l’autre côté de miroir” ?

Oui, car j’aime rendre visible ce qui ne l’est pas forcément. Durant mes concerts, le processus de fabrication des morceaux est intelligible. Quelque part, le public passe de l’autre côté, il monte et voit les choses se faire.

Sur scène, tel un orchestre à vous tout seul, vous jouez de chaque instrument. L’aspect performatif est-il important lors de vos sets ?

C’est intéressant de voir à quel point on peut repousser les limites pour tout construire en live. Les séquences au violon, à la guitare ou aux claviers sont jouées et enregistrées sur scène, les rythmiques électroniques sont générées en direct. Cela se traduit par une partition de gestes : je déclenche des séquences, j’enregistre des boucles… C’est une sorte de chorégraphie où je prends le plus de risques possible.

http://www.youtube.com/watch?v=BfPCdEEUf3E&feature=plcp&context=C46d70ebVDvjVQa1PpcFN9pLQeLCsZm3GHzqOgeldWMeBsZvT96-A%3D

Votre cursus classique au Conservatoire de Metz explique-t-il une approche différente des machines ?

Il s’agit de deux mondes qui sont complémentaires pour moi. Les possibilités d’expérimentations de l’electro m’intéressent : créer des interfaces entre les machines et l’ordinateur, élaborer des effets, manipuler les lois acoustiques, faire des mathématiques et explorer l’aléatoire. Par contre, quand je joue du violon, mon cerveau est en pause. C’est plus naturel. Mon approche est traditionnelle : je compose au clavier, j’écris des partitions, des plans d’accords…

Vos compositions sont comme autant d’études autour d’un thème ?

Oui, c’est mon côté “Conservatoire” : j’essaye d’appliquer des théories, de faire des morceaux basés sur un principe. Protest, par exemple, est écrit à la manière d’un choral protestant. Ils partent d’un concept, même si on ne s’en rend pas forcément compte à l’écoute.

D’où vient votre ouverture musicale ? De la période où vous avez disséqué la vaste discothèque parentale en samplant du classique, du jazz, du rock ou de la world ?

Quand j’ai commencé à faire de la musique sur ordinateur, influencé par le label Ninja Tune, DJ Shadow ou Cut Chemist, j’ai samplé tous ces disques appartenant à mon père. C’était pour moi une manière de comprendre la musique, de la décortiquer. Voir comment c’est fait.

Chapelier Fou, en concert mercredi 11 avril à La Laiterie

www.laiterie.artefact.org

Festival des Artefacts, du 11 au 28 avril, à Strasbourg, à La Laiterie et au Zénith Europe

03 88 237 237 – http://festival.artefact.org/2012

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