Station to station

Photo de Jérémie Blancféné

L’auteur de Station Mir 2099 a découvert une machine à remonter le temps conduisant dans les nineties (projet Dima) ou les eighties (Kompromat). Le dijonnais Vitalic fait escale sur terre et entre dans l’Ososphère

Des chercheurs ont découvert la playlist de la Nasa pour Apollon 11. Armstrong et ses acolytes écoutaient Les Baxter, Franck Sinatra ou Ella Fitzgerald… Qu’emporteriez-vous sur la lune ?
J’amènerais du Wim Mertens ou du Tom Yorke, de la musique piano / voix. Des choses minimalistes, apaisées… lunaires, mais pas forcément électroniques. Mon disque Voyager, par exemple, est né d’un fantasme de l’espace : je ne suis pas certain que dans la réalité, il serait vraiment approprié.

Voyager n’est pas la bande-son idéale pour léviter dans la galaxie ?

Non, mieux vaut prendre de la musique terrienne, pas le résultat d’un rêve de voyage cosmique.

La techno est-elle toujours la musique du futur, 35 ans après son invention ?
Elle l’a été et l’est encore lorsque des gens comme Jon Hopkins s’en emparent. Sinon, en festival, à la radio ou ailleurs, quand j’entends les prods actuelles, je me sens davantage en 1994 que dans le futur. Il y a toujours une révolution technologique derrière un nouveau style, un mouvement. Ça n’est pas le cas ces dernières années. La techno est la dernière grande invention. Il y a quelques avancements, par petits cercles concentriques, mais pas de chamboulement.

Dijon était-il un Berlin français durant les années 1990 ?

Par rapport à la taille de la ville, c’était vraiment dingue, Dijon étant devenu un épicentre de la musique électronique. Un ancien musée rassemblait au moins 2 000 personnes chaque week-end pour des raves. Laurent Garnier avait lancé ses soirées Wake Up : il y en avait une le vendredi à Dijon et une autre le lendemain à Paris, au Rex ! Cette période est révolue car cette culture était portée par des magasins de disques ou des bars liés à cette musique. Une toile de fond créant une réelle émanation… aujourd’hui disparue.

Le maxi de Dima, sorti sur Citizen Records, marque-t-il un retour aux sources qui ne s’embarrasse pas de fioritures ?
J’ai mis entre parenthèse mon label, Citizen Records, au moment de mon emménagement à Paris. Il vient d’être réactivé pour mes propres productions, sous mon pseudonyme Dima notamment, ainsi que celles de mes proches. Le concept de Dima était vraiment de nous replonger dans les 1990’s. Pour les projets moins “purement techno”, comme Kompromat, j’ai créé Clivage Music.

Kompromat, duo que vous formez avec Rebeka Warrior de Sexy Sushi, est-il né de l’envie de renouer avec DAF, la new- wave et l’EBM ?
On s’inspire d’une époque, mais nous n’avons pas fait de brainstorming autour d’une es- thétique. Je lui ai fait écouter des instrus et elle a posé sa voix dessus, tout simplement. D’ailleurs, sur l’album, il y a aussi des beats disco et des machines qui hurlent comme des punks ! Kompromat est assez fourre-tout, allant de l’Electro Body Music à la poésie.

Quelle histoire raconte l’album ? S’agit- il de la BO d’un rêve ou de la vie ?

Il dit de manière métaphorique que la vie ne s’arrête jamais vraiment car tout est recyclé et chacun laisse une trace sur le monde. Ça fait pompeux, dit comme ça, mais le disque parle de ce mouvement de balancier.

Une invitée ne passe pas inaperçue sur le disque : la “combattante” Adèle Haenel…
Elle a participé à l’album en amont, en scandant en allemand dès les prémices du disque. Grâce au morceau De mon âme à ton âme, je me sens un peu comme Gainsbourg faisant chanter une actrice ! Vous avez raison, Adèle, comme Warrior, sont deux personnes fortes et engagées. Ce sont des guerrières !

Composez-vous des images plein la tête ?

Oui, il peut s’agir de scènes de films, comme Easy Rider, de vidéos de la terre vue de la lune à l’origine de Station Mir 2099, ou d’un simple manège de chevaux vu dans le Sud de la France qui m’a inspiré Poney.

Un de vos titres, The Legend of Kaspar Hauser, est la BO du film éponyme avec Vincent Gallo…
C’est une commande du réalisateur, Davide Manuli, dont j’adore le délirant travail. Le film a été tourné en Sardaigne, mais on ne sait pas vraiment où et quand on se trouve. Manuli peut laisser sa caméra tourner durant de longues minutes sans rien faire, en donnant la liberté à ses personnages de se mouvoir comme ils l’entendent. Chez lui, il y a une poésie chelou…

 


Sounds Of Life,
édité par Citizen Records
citizen-records.com


Traum und Existenz, édité par Clivage Music
clivagemusic.com


Dima, dans le quartier de La Laiterie (Strasbourg), samedi 21 septembre, dans le cadre du festival Ososphère (du 13 au 22 septembre, avec Ellen Allien, Salut c’est cool, Arnaud Rebotini, Agoria, The Hacker, Kiddy Smile…)
ososphere.org
Kompromat, à La Laiterie (Strasbourg), jeudi 10 octobre et à La Rockhal (Luxembourg), vendredi 11 octobre artefact.org

rockhal.lu

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