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Bruegel l’Ancien s’est saisi du site de Dilbeek pour créer des « collages » mêlant éléments réels belges et autres parcelles de contrées parfois lointaines

Les toiles du peintre né en 1525 et décédé en 1569 fourmillent de détails et clins d’œil à la région où il finira ses jours. Composition en plusieurs plans, profondeur de champs, juxtaposition de thématiques (religieuses, sociétales…), panoramas construits comme des puzzles à tendance narrative : l’expo commissionnée par Stefan Devoldere (professeur et doyen de la Faculté d’Architecture et d’Art à l’Université de Hasselt) est une « vue en plongée sur un paysage imaginaire », doublée d’un effet dramatique. Bruegel l’Ancien s’est saisi du site pour créer des « collages » mêlant éléments réels belges et autres parcelles de contrées parfois lointaines – comme des monts alpins incongrus – et rend hommage à une région toute en courbes, multipliant les lignes de fuites, à l’image de la topographie de la région de Pajottenland.

La chasse aux trésors artistiques, architecturaux et paysagistes nous mène notamment dans un sous-bois où une structure circulaire délimite un espace théâtralisé grâce à des rideaux étincelants. Sur les voilages tombant entre les arbres élancés sont imprimés des détails ultra-zoomés de “La Tour de Babel” (1553) qui se fondent dans le décor : “Model for a Tower”, œuvre du bureau d’architecture OFFICE KGDVS & Bas Princen place le visiteur au cœur de la toile du maître où les éléments, les époques et les territoires s’entremêlent. Ce “pavillon”, intervention scénographique et photographique, répond à l’œuvre Sint-Anna-Pede, située plus loin, dans un tout autre cadre, sous un viaduc ferroviaire : une maisonnette inachevée réduite à ses échafaudages qui renvoie à la fois aux habitations périphériques et à la tour babylonienne utopiste de Bruegel. En son centre, un cercle peint sur la structure en bois figure, par anamorphose, un soleil couchant (selon l’emplacement du regardeur), concluant un trajet en un trompe-l’œil éphémère.

Nous ouvrons grand les yeux, chaussés de bonnes baskets, tout au long des sept kilomètres du sinueux parcours à travers lotissements et champs. Un chemin artistique traversant des étendues de blés ou maïs, madeleines proustiennes de l’immense comédien Josse de Pauw qui évoque oralement, via un poétique audio-guide, le « cher paysage ondoyant » de sa jeunesse. Le monde rural contemporain et l’univers pastoral des gamins ont inspiré le bureau d’architectes-paysagistes de Landinzicht, pour un vaste terrain de “Jeux d’enfants” fait d’objets cheap caractéristiques du domaine agricole : silos en polyester transformés en instruments de musique de fortune ou baignoires / abreuvoirs customisés devenant amusants jets d’eau. Ludique, humoristique et artistique, cette installation interactive, hommage aux “Jeux d’enfants” (1560) de Bruegel, questionne avec malice la disparition des paysages ruraux au détriment d’une périurbanisation plus sauvage que les inhospitaliers marais du Pajottenland.

 

 

À Dilbeek, près de Bruxelles, jusqu’au 31 octobre

deblikvanbruelgel.com

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