Noga Erez s’empare du vieux continent

Photo © Shai Franco

Avec KIDS et ses compositions jubilatoires, la charismatique chanteuse israélienne Noga Erez fait un retour percutant sur les scènes du vieux continent.

Surgie de nulle part, avec sa frange impudente et ses yeux verts de lucidité, la chanteuse et productrice Noga Erez a dynamité la pop mondiale voilà quatre ans avec un premier album tout en fureur, Off The Radar. Capable de sauter allègrement de la rutilance du rap au groove moelleux d’une berceuse chantée tard dans la nuit, l’Israélienne à l’énergie décapante signe un deuxième album au-delà encore des espérances. Mêlant avec bonheur mélodies barrées à la Björk, verve bouillonnante façon M.I.A. et rythmes funky rebondissants dignes des meilleures heures de Gorillaz, KIDS réunit quatorze titres plus entraînants les uns que les autres. Conçues en collaboration avec Ori Rousso – son partenaire à la scène comme à la vie –, les chansons alternent entre tension et décompensation, évoquent la mort, la perte d’êtres chers, les relations toxiques, le coronavirus ou encore les vies étouffées par le confinement et les journées passées à scroller sur les réseaux sociaux… « I don’t wanna look at my phone anymore / I don’t wanna rool like a stone anymore / I cannot hear my thougts in this silence no more / Bring back the noise, bring back the noise » (« Je ne veux plus regarder mon téléphone / Je ne veux plus être une pierre qui roule / Je n’entends plus mes pensées dans ce silence / Ramenez le bruit, ramenez le bruit »), déclame-t-elle de sa voix désabusée dans le jubilatoire NO news on TV.

Toute en saillies provocatrices et géniales fulgurances, la jeune femme ne manque ni d’autodérision, ni d’ambition : « Mon idée, c’est de susciter certains questionnements, pousser à la réflexion et, dans le même temps, offrir du fun et de l’évasion », explique-t-elle. Tous les artistes israéliens ne parlent pas du conflit avec la Palestine. Mais Erez, profondément marquée par les deux ans de service militaire qu’elle a dû effectuer – comme tous ses compatriotes à la majorité –, est de ceux qui ont fait le choix de le dénoncer. Sans compromissions. Et si la politique est moins présente ici que sur son précédent opus, elle hante encore les productions dépouillées de morceaux tels Fire Kites et KIDS où elle retranscrit la psyché prête à imploser des femmes devant élever leurs enfants en pleine guerre larvée, de part et d’autre de la ligne de démarcation. La voix de la propre mère de l’artiste émaille d’ailleurs tout le disque, par bribes, depuis le touchant morceau d’ouverture de dix secondes (KTD, pour Kids these days, les enfants d’aujourd’hui) jusqu’à l’intro de End of the Road, hantée par le spectre de la disparition de ceux qui nous ont tout transmis, à commencer par la vie.


Au Les Georges Festival (Fribourg) lundi 16 juillet et au Cabaret Vert (Charleville- Mézières) samedi 20 août
nogaerez.com

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