Bogota Social Club : Les Colombiens du Meridian Brothers revisitent El Grupo Renacimiento

Photo de Mariana Reyes

Avec leur dernier opus, les Colombiens du Meridian Brothers poursuivent leur hommage fantasque à la musique latina et revisitent la “salsa dura des seventies.

Depuis près d’un quart de siècle, le producteur colombien Eblis Álvarez (à gauche) secoue la scène underground latino-américaine en réinvestissant avec truculence et inventivité le riche patrimoine musical de son pays. Loin de la cumbia aseptisée dont se repaît aujourd’hui l’industrie mondialisée, cet authentique digger dans l’âme œuvre, avec ses quatre complices du Meridian Brothers – combo expérimental aussi baroque que barré –, à la réévaluation des folklores andins, latins ou afro-caribéens trop longtemps méprisés et ringardisés, du vallenato au bullerengue. Un an seulement après l’album Paz en la Tierra, la formation bogotanaise remet ainsi au goût du jour El Grupo Renacimiento, mythique et éphémère septet de ”salsa dura devenu, à la fin des années 1970, la voix de la jeunesse dans un pays déchiré par la guerre civile et l’essor du narcotrafic, avant de voir ses membres tomber dans la drogue et l’oubli. C’est du moins ce que raconte la légende… inventée de toutes pièces par les Meridian Brothers ! Car Renacimiento n’a jamais existé. Le groupe imaginaire sert en réalité de prétexte à un hommage aussi fantasque que respectueux aux productions salseras des seventies, celles du grand Joe Arroyo ou d’orchestres comme La Columna de Fuego ou Los Hermanos Lebrón, portés par le souffle révolutionnaire de l’époque et les promesses marxistes d’un renouveau social et politique. 

Meridian Brothers & El Grupo Renacimiento – La Policia

« Sucio policía, no hay diversión / Anarquía absoluta, la Solución » (« Policier pourri, pas de distraction / Anarchie absolue, la Solution »), chante Álvarez de sa voix modifiée sur le refrain du morceau d’ouverture, La Policía, qui dénonce les violences policières d’hier – et surtout d’aujourd’hui – au rythme chaloupé des congas. Dans Metamorfosis, son double venu du passé imagine se réveiller un jour dans la peau d’un robot. Errant à corps perdu dans un monde kafkaïen au possible, « plein de caméras, plein de drones », il prie les divinités yorubas de le sauver d’un futur dystopique où la technologie cannibalise l’humain. C’est du néo-tropicalisme pur jus. Musicalement, la copie est parfaite, de la salsa à l’os : la façon de chanter, le format, les montunos répétitifs du piano. Et puis, deci delà, subtilement saupoudrées, quelques nappes de synthés résonnent, donnant à l’ensemble un jubilatoire effet de pastiche psyché. Le disque sort chez Ansonia Records, mythique label créé dans les années 1940 à Brooklyn par un immigré portoricain. Merengue, bomba, mambo, boogaloo… la maison joua un rôle majeur dans l’essor de la musique latina, avant de péricliter à la fin des eighties. Elle renaît aujourd’hui de ses cendres avec ce Meridian Brothers & El Grupo Renacimiento, annonçant déjà quelques autres perles à venir !


Aux Trinitaires (Metz) mercredi 14 septembre 
citemusicale-metz.fr

Édité par Ansonia Records
ansoniarecords.com

vous pourriez aussi aimer