L’homme à la gibson

Photo de Yann Buisson

Des débuts difficiles aux tournées qui affichent complet, le plus rockeur des bluesmen français Paul Personne a tout connu. Rencontre au moment où il reprend la route avec Funambule (ou tentative de survie en milieu hostile).

Bonjour Paul Personne, comment vous sentez-vous ?
Je me sens très bien, excité par cette nouvelle tournée. “Personne” (rires), à chaque fois qu’on prononce mon nom d’artiste ça me fait sourire. J’ai choisi ce pseudo à une époque où la musique ne fonctionnait pas pour moi, alors que je ne ressentais que le besoin de m’exprimer avec ma guitare. J’ai toujours laissé une place importante à mon état d’esprit et à la musique. Celui qui n’était personne est devenu quelqu’un si je puis dire… mais c’est un peu tard aujourd’hui pour changer de costard ! Et “Paul Quelqu’un” ça sonne moins bien, non ?

En chiffres, Paul Personne c’est trente ans de carrière solo, une vingtaine d’albums… Il vous arrive de vous retourner ?
J’ai très rarement effectué de bilan. Et quand je l’ai fait, c’était en discutant avec un pote. Lorsque je remonte la machine, ce sont des sensations qui me reviennent. Des instants de vie, des moments sur scène et sur les routes avec ma Gibson Les Paul Gold top. Une chanson peut partir d’un mot, d’une mélodie ou d’une émotion que je suis en train de ressentir. J’essaie de rester le plus simple possible dans mes textes, c’est ce qui me donne une identité blues. Le rock vient de la folie de la gratte qui me possède.

Est-ce la guitare qui vous a servi de balancier pour garder cet équilibre ? Pourtant vous aviez démarré la musique par la batterie…
J’ai avancé avec la musique et les rêves. Prendre une gratte, une valoche et tout mettre dans une bagnole. Mon tout premier choc, ce fut Johnny Hallyday, en noir et blanc sur l’unique chaîne de mes parents dans les années 1960. Il chantait Laisse les filles avec une guitare, une veste en cuir et une chemise à franges. Il se roulait par terre en hurlant… C’était complètement dingue. Et puis il y eut les Beatles et les Stones. Mon premier réflexe : récupérer des boîtes de biscuits vides et taper dessus avec des cuillères et des spatules en bois. La guitare est venue ensuite, naturellement. Les sensations sont indescriptibles. C’est un prolongement de la main qui permet de s’exprimer avec une facilité déconcertante, même quant on n’est pas bon au début (rires). D’ailleurs, j’improvise souvent sur scène et ça ne se passe pas toujours bien !

Pourquoi ce sous-titre, Tentative de survie en milieu hostile ?
Dans Chez Moi, je chante « Je vais souvent voir ailleurs, exciter mes peurs […] et toujours partir, pour mieux revenir chez moi. » Chacun cherche un endroit stabilisant, même ceux qui, comme moi, aiment la route. Les villes m’agressent alors j’ai choisi de m’installer dans la campagne normande. Non pour trouver l’inspiration, que je trouve sur les routes et en partageant des moments de musique, mais pour m’occuper de ma chèvre Lili (rires)… et retrouver ma famille ! Rentrer chez moi, c’est faire grandir mon envie de repartir, comme aujourd’hui. J’aime aller à la rencontre des gens. J’ai beaucoup de chance d’être encore là. Ne pas être une idole m’a épargné. Ce que j’aime le plus pendant mes concerts, c’est retrouver des têtes, les reconnaître après toutes ces années au premier rang, à côté d’autres qui me sont inconnues. Il y a un mélange des générations qui me fait dire que je ne suis pas qu’une ombre qui s’accroche.

C’est cette liberté qui vous a conforté dans un choix d’indépendance ?
Pour défendre ma musique, j’ai refusé des propositions de maisons de disques. Je n’ai jamais abandonné, même si ça a été difficile au début. Dans Karma je scande « Même pas peur, je t’aurais un jour. » Je ne fais pas pour plaire où répondre à des critères. Il faut croire que cette démarche sincère fait que j’ai aujourd’hui un public fidèle.

Aujourd’hui, sans Johnny, comment un enfant peut-il avoir envie d’attraper une guitare et se rouler par terre ?
La guitare, comme d’autres instruments, fait partie du tout d’une chanson et de la sensibilité d’un artiste. Ça ne doit pas être qu’un déluge de notes sans âme. Quand le gars arrête de chanter, sa guitare doit faire le reste et prolonger ses paroles. Même si c’est imparfait. Surtout si c’est imparfait d’ailleurs… parce que la vie est comme ça ! Sur ton ordi, tu fais un clic et tu as tout à portée de main. Le désir, le chemin à parcourir pour avoir ce que l’on veut… C’est tout ça qui est intéressant. « Tu ferais mieux d’éteindre les écrans malsains, un minimum de JT ce serait bien, si tu veux t’enfuir pour oublier alors viens. »

Photo de Yann Buisson

À La Laiterie (Strasbourg), vendredi 20 mars

À La Rodia (Besançon), samedi 21 mars

À La Vapeur (Dijon), dimanche 22 mars

À L’Olympia (Paris), vendredi 27 mars et mercredi 24 juin

À l’Espace Jean Ferrat (Longlaville), samedi 30 mai

Au Motordays (Gérardmer), dimanche 31 mai

paulpersonne.com


Édité chez Very Cords Records
verygroup.fr

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