Invités à clore la saison du Ballet de Lorraine, les jeunes virtuoses du Nederlands Dans Theater 2* interprètent un diptyque d’une grande physicalité.
En ouverture, le public retrouve Marcos Mauro, qui avait déjà collaboré avec l’institution nancéienne en 2016 avec Le Surréalisme au service de la révolution. Il présente Folkå, créée en 2021 avec les jeunes artistes du NDT2. Célébrant la vie à travers ses rites, coutumes et traditions, la pièce met en lumière ces instants de communion permettant à chacun de transcender la solitude pour trouver sa place dans le monde. Au fil d’une succession de tableaux mystiques évoquant la finitude de l’Homme, quatorze danseurs nous emportent dans une traversée frénétique de la psyché. De la naissance à la mort, la troupe égrène le cycle éternel des questionnements métaphysiques et des réponses fictionnelles que nous leur inventons, terreau des légendes et autres superstitions. Entre les costumes unisexes revisitant les motifs typiques du vestiaire est-européen, à l’instar de la broderie bleue sur fond blanc rappelant le vychyvanka ukrainien, et l’habillage sonore de Juan Cristóbal Saavedra fusionnant mélopées traditionnelles et rythmes hypnotiques, se dessine une communauté en quête d’apaisement, cherchant l’harmonie dans l’agitation de l’existence. Alternant légèreté et pesanteur, nervosité et ralenti, la danse contemporaine déploie toute sa dualité dans ce paradoxe.
Fidèle à son goût pour le mélange des genres, Mauro assume le métissage en adoptant la précision du geste comme fil rouge, empruntant au classique ses lignes élégantes, au voguing ses enchaînements de poses anguleuses et au breaking ses figures et acrobaties au sol. Sans oublier quelques clins d’œil à l’oro, danse folklorique monténégrine. Le second volet donne carte blanche à Botis Seva, talent émergent de la scène urbaine britannique. Inspiré par les sentiments de perte et de souffrance, le fondateur du collectif Far From The Norm sonde la confrontation de l’individu au monde qui l’entoure. Sa nouvelle création Watch Ur Mouth s’articule autour de la critique artistique et de son impact sur le processus créatif. Sur une partition inédite du compositeur Torben Sylvest, déjà présent sur l’abrasif BLKDG (2019), le Londonien développe un langage singulier questionnant les conventions, puisant dans le théâtre physique, le cinéma et les arts plastiques. Jaillissant du clair-obscur emmitouflés dans des tenues beiges mi-uniformes mi-armures, les huit interprètes mêlent fluidité du hip-hop et explosivité du contemporain, dans une performance organique et électrique, entre moments de grâce et tourbillons de turbulence.
À l’Opéra national de Lorraine (Nancy) mercredi 7 et vendredi 9 mai
ballet-de-lorraine.eu
* En 1978, la compagnie a fondé le NDT 2 sous la direction de Jiří Kylián, histoire de faire éclore de jeunes talents et de préparer seize danseurs récemment diplômés, souvent de formation classique, à l’élite mondiale
