Aux arches, citoyens

Initié par le collectif britannique Quarantine, le projet participatif ARK transforme le Théâtre du Maillon en lieu de vie, d’échange horizontal et collaboratif.

Comme une réponse par le faire au regain du nationalisme, boosté par une crise dont les effets vont s’étaler
sur de longues années, cette proposition de théâtre de citoyens est portée par Moving Borders. Sept partenaires réunis en réseau, bien décidés à faire bouger les lignes de fracture qui nous saisissent, en promouvant une proposition d’intervention dans l’espace public dont les jalons ont été inventés par Quarantine. Tel un pied de nez au Brexit, Athènes, Dresde, Porto, Utrecht, Varsovie, Mülheim an der Ruhr et Strasbourg mettent en relation artistes et citoyens pour des projets in situ d’intervention. « Ce collectif britannique a un travail très peu spectaculaire. Il ne s’agit pas de préparer un spectacle avec des gens de chaque ville, mais de travailler sur les relations et l’expérience partagée », expliquent, de concert, Leyla-Claire Rabih, Élise Simonet et Antoine Cegarra. Avec Mathilde Mertz, ces quatre artistes d’horizons divers planchent depuis l’automne sur Ark, dessinent des contours communs, inventent un territoire qui serait à « habiter et arpenter par les participants de nos ateliers respectifs, comme pour le public qui viendra au Maillon, à l’instar d’une sorte de classe Freinet », s’amuse Leyla-Claire Rabih. D’où sa proposition de promenades sensibles et subjectives du Wacken, mené pour une ou deux personnes à la fois par une ou un Strasbourgeois ayant un rapport affectif, personnel ou professionnel avec lui. Une superposition de trajectoires subjectives et de manières de voir un quartier en plein bouleversement par les yeux des participants des ateliers qui seront les acteurs de la restitution. Cette balade immersive n’est qu’un des temps de l’arche qu’ils imaginent avec les étudiants en scénographie de la Haute École des Arts du Rhin, chargés de transformer les vastes espaces du Maillon en lieu où se prélasser. S’y déploieront ainsi une bibliothèque, une ludothèque ou encore une table de ping-pong. Le temps d’un long week-end estival, le pluralisme culturel de la capitale européenne, tout comme les notions de frontière, d’altérité, de communauté et de partage seront au centre d’un espace pensé pour favoriser les rencontres et l’édification collective. Antoine Cegarra a imaginé une assemblée des savoirs, « sorte de parlement alternatif de 12 personnes, assises à une table individuelle, constituant autant d’anti-experts qui partageront, en un quart d’heure, un savoir bien à eux : chibanis, écoute active, cheval sont autant de sujets possibles… » En tête-à-tête se déroule également la proposition d’Élise Simonet autour de la traduction : elle invente à partir d’entretiens un jeu de cartes muni d’un livret dont elle confie les illustrations à des élèves de la Hear. S’y explorent le multilinguisme, la traduction et ses incompréhensions, mais aussi l’écart des significations affectives des mots. Et Leyla-Claire de conclure : « Face à la précarité collective d’une année de repli sur soi, nous avons besoin d’un processus commun car c’est là que le sensible a lieu et que le politique s’invente. »


Au Maillon-Wacken (Strasbourg), du 16 au 18 juillet (gratuit)
maillon.eu

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