Yes to yazz

Détail de l'affiche de l'exposition Entartete Musik (Düsseldorf, 1938)

En 2003, le chef d’orchestre Amaury du Closel a fondé Voix étouffées pour faire redécouvrir les compositeurs victimes des totalitarismes. Intitulée Swing verboten, cette nouvelle saison est placée sous le signe du jazz.

Après 1918, quelle réalité recouvre le jazz en Europe ? Le jazz – on dit yazz à l’époque – arrive en Allemagne avec la défaite de 1918, apporté par les armées américaines et françaises. Ses syncopes, sa blue note et ses rythmes endiablés envahissent les clubs et les cabarets. Ils sont une source d’inspiration pour toute une génération de compositeurs qui souhaite créer un nouveau langage musical face à une culture impuissante à s’opposer à la Première Guerre mondiale.

En quoi ce genre musical représentait-il tout ce que le Troisième Reich abhorrait ? Le jazz est considéré dès les années 1920 par les conservateurs et les partisans d’un NSDAP naissant comme représentant l’ennemi de la culture allemande sur un plan esthétique et moral – les thèmes de la lascivité du jazz, de son immoralité sexuelle sont alors très présents – et encore plus sur le plan racial, musique de “nègres” ou de juifs.

L’Europe était-elle en avance dans le domaine du jazz à cette époque ou suivait-elle les musiques américaines ? Elle imite les standards de la musique noire, et en est donc dépendante. Le jazz revisité par la musique savante en retire en revanche une substantifique moelle, par le biais d’un langage rythmique et harmonique nouveau, comme par exemple Darius Milhaud en France, Erwin Schulhoff en Tchécoslovaquie, Matthias Seiber en Allemagne, et bien sûr Kurt Weill.

Vous allez donner les Holocaust Songs de Norbert Glanzberg : que pouvez-vous nous en dire ? Norbert Glanzberg s’exile en France en 1933, et après bien des difficultés, devient notamment le compositeur et l’accompagnateur d’Édith Piaf, puis d’Yves Montand, pour lesquels il écrit des tubes comme Padam, padam ou Sur les grands boulevards. Dans les années 1980, se penchant sur ses racines juives et son destin marqué par le nazisme, il écrit les Holocaust Songs, chansons de cabaret basées sur des poèmes ou des lettres de victimes de la Shoah.

Programme Seiber / Schulhoff / Hartmann / Weill / Wolpe, au Centre tchèque (Paris), samedi 8 octobre et en l’Église Saint-Guillaume (Strasbourg), dimanche 9 octobre

Programme Schulhoff / Weill / Hartmann / Glanzberg, au Mémorial de l’Alsace-Moselle (Schirmeck), dimanche 16 octobre, au Musée du Struthof (Natzwiller), dimanche 23 octobre et à la Synagogue d’Obernai, dimanche 6 novembre

www.voixetouffees.org

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