Un été jazzistique

Congo, Trinité-et-Tobago, Israël, Afrique du Sud, Japon, Colombie, États-Unis… Les artistes conviés lors des festivals viennent de partout. Ils illustrent l’immense diversité qui, l’air de rien, s’invite à nos oreilles. 

On ne prend pas gare aux patrimoines qui habitent l’œuvre ultra-moderne du guitariste virtuose Keziah Jones ou les titres plus traditionnels de la chanteuse Calypso Rose. Tous deux sont à l’affiche de Wolfi Jazz qui, plus que jamais, ouvre ses frontières hors du sacro-saint genre américain, sans délaisser la créativité de la scène hexagonale, avec un OFF parfois si intéressant (Pierre Durand Roots 4tet, Ozma) qu’il mériterait le IN. Traversons le Rhin en direction de Stuttgart et de son Jazz Open festival qui accueille cette année trois véritables légendes : le pianiste sud-africain Abdullah Ibrahim et les américains Herbie Hancock et Wayne Shorter. Ils sont octogénaires ou presque, n’attendez plus… d’autant qu’il suffit de trois notes à Abdullah Ibrahim, dont le toucher est magique, pour convaincre tout le monde. Plus local, le festival de Jazz Manouche de Zillisheim convoque une fois de plus les références d’un genre dont la bonne implantation jouit d’une forte présence communautaire dans la région. Des Reinhardt, Diven, Cherry et Mitcho y joueront, sans oublier Rocky Gresset et l’incontournable Angelo Debarre. Avec eux, on avance en terrain connu, il suffit d’y aller les yeux fermés ! Pour les découvertes et étonnements, c’est du côté de la version outre-Rhin de Jazzdor et outre-Vosges du festival Aspro-Impro. À Berlin, le premier mise sur une programmation de pontes de la musique improvisée française et européenne. Louis Sclavis y présentera Loin dans les terres, une création datée du trentième anniversaire de Jazzdor Strasbourg. Pour Elise Caron & Edward Perraud, Simon Goubert et Sophia Domancich, ou même Emile Parisien et Vincent Peirani, dans leur nouvel album en quartet, c’est l’histoire d’amis et compagnons de longue date qui se retrouvent sur scène pour créer. À Besançon, Aspro-Impro s’en réfère à Auguste Rodin : « En Art, la simplification est la vraie grandeur. » Sous ce précepte, il a été décidé de ne programmer que des solos de musique improvisée. Aussi osé que fort ! Il faut être curieux et attentif. De superbes musiciens tels que Louis Sclavis (toujours lui), Elodie Pasquier ou Dominique Pifarely y expérimenteront les possibles offerts par leurs instruments.

Marc Ribot

Au Grès du Jazz

Le festival de la Petite Pierre fête ses 15 ans. Assister à des concerts d’exception, devant des artistes de tous horizons, dans le magnifique cadre de l’Alsace Bossue est une incongruité qui se savoure. Il faut rendre hommage à Guy Hergott et son équipe qui ont créé, maintenu et poli ce joyau douze ans durant. Si Au Grès du Jazz est un rendez-vous incontournable de la région, c’est aussi parce qu’ils ont partagé leurs connaissances avec le public. Valentine Wurtz et Alex Von Arx ont repris le flambeau de cette programmation de très bonne facture. Entre le jazz easy listening d’un Hugh Coltman et une vraie recherche d’originalité avec les duos piano / saxophone de Joachim Kühn et Archie Shepp ou piano / harpe de Hiromi et Edmar Castaneda. Jusqu’à présent cantonné au trio, le pianiste israélien Shai Maestro prendra l’émouvant risque du solo. Une mise à nu qui promet. À noter, la présence de son ancien mentor, le contrebassiste Avishai Cohen. Mais, plus que tout, il faudra écouter le duo père / fils (guitare / violoncelle) de Pedro Soler et Gaspar Claus qui ira aux confins du flamenco, en un écho lointain du jazz manouche de Sandro Lorier ou de Bireli Lagrène, le local de l’étape.

 

Festival météo

Qui n’a jamais connu les surprises de la météo ? Celles des prévisions qui ne disent jamais tout ? À Mulhouse, les risques ne sont pas les mêmes. Protégé, au chaud, le public est exposé à l’une des essences du jazz : l’improvisation. Deux géants du free jazz, Matthew Shipp (piano) et Evan Parker (saxophone) en donneront une leçon aboutie lors d’un hommage à John Coltrane. L’association de ces trois noms en fait la plus belle affiche du festival sur le papier. Du même calibre, l’immanquable guitariste Marc Ribot (John Zorn, Tom Waits), avec son projet Céramique, est l’assurance d’une claque.

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