Thoreau par les cornes

À partir de Walden ou la vie dans les bois, récit d’Henry David Thoreau, Ramona Poenaru et Gaël Chaillat créent Ma Cabane, pièce “construite” avec l’aide de jeunes Mulhousiens. Une invitation à sucer la moelle de la vie.

Nous rencontrons Ramona Poenaru (vidéo) et Gaël Chaillat (manipulation) de la compagnie Des Châteaux en l’air, chez eux, à Strasbourg, à quelques jours de leur séjour au long cours à La Filature. Au beau milieu de cartons éparpillés – éléments de la mise en scène –, ils s’apprêtent à vivre une résidence d’un mois dans l’enceinte du théâtre mulhousien, avec enfants et bagages. Une retraite faisant écho (toutes proportions gardées) à celle d’Henry David Thoreau (1817-1862), auteur de Walden qui s’est isolé durant deux ans, deux mois et deux jours, de 1845 à 1847, dans une cahute construite de ses mains, au bord de l’étang de Walden. Sous les arbres, en contact direct avec la nature, l’Américain observa la flore et écouta le chant des oiseaux. Il renoua avec ses fondamentaux, loin des contraintes de la société, de l’argent et des conventions. De cette expérience solitaire (relative : il n’est qu’à quelques kilomètres du monde civilisé dont il ne se coupe pas totalement), il tirera Walden, un ouvrage fondamental s‘adressant « à ceux qui doutent, une réflexion philosophique qui donnent des outils pour aborder la vie », selon Ramona et Gaël.

Quel impact a, aujourd’hui, ce récit écrit au XIXe siècle ? Pour apporter une réponse, le couple initie une réflexion autour d’ateliers pédagogiques avec des collégiens et lycéens de Mulhouse. Gaël Chaillat : « Le texte est magnifique, lyrique, avec des envolées philosophiques. Mais nous n’allons utiliser que des extraits, des idées, des mots, pour initier une discussion. Thoreau nous dit : simplifiez vos besoins pour vivre, devenez ce que vous êtes, n’écoutez pas les gens autour de vous… pour ne pas apercevoir, à l’heure de votre mort, que vous n’avez pas vécu. » Se retirer, prendre le temps de penser, de se demander « quelle est sa cabane intérieure et comment forger sa pensée » ?

Ma Cabane, forme courte, dispositif dont l’esthétique répond à l’ascétisme de Thoreau, oscille entre installation plastique et théâtre. Dans la salle, des extraits sonores rendront (en partie) compte des différents ateliers. Sur scène, des cartons empilés, tels des briques agglomérées symbolisant une réflexion qui s’organise peu à peu, permettent des jeux de construction et de déconstruction grâce aux manipulations de Gaël. Ils prendront la forme d’éléments architecturaux et deviendront espaces de projection sur lesquels défileront des images : la Maison du peuple de Ceausescu, des villas dans un lotissement ou encore des habitats de fortune. Un jeu de Lego, une vision pointilliste de la philosophie de Thoreau, « une plongée dans la pensée en mouvement de l’auteur de Walden ».

 

À Mulhouse, à La Filature, les 9 et 10 avril (à 19h, en première partie de Tout va bien en Amérique )

03 89 36 28 28 – www.lafilature.org

À Erstein, à l’Auditorium du Musée Würth, mardi 7 mai (à 10h30 et 14h30)
03 88 64 74 84 – www.musee-wurth.fr

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