Renaissance

© Jean-Charles Sexe

Fermé depuis 2014 pour rénovation, le Musée des Beaux- Arts et d’Archéologie de Besançon rouvre ses portes. Entretien avec son directeur, Nicolas Surlapierre, dans un espace totalement repensé.

Le projet du cabinet d’Adelfo Scaranello a-t-il été, dans le respect total de l’ancienne halle aux grains de Pierre Marnotte (1843) et de la structure en béton de Louis Miquel (1970), de rendre plus lumineux et lisible l’ensemble des espaces ?
Entre les années 1970 et la fermeture du Musée, des cloisons ont été montées, enfermant le grand quadrilatère de Miquel. Comme la lumière du jour ne baignait plus cette architecture devenue aveugle et sombre, Scaranello a créé une verrière autour du Musée. Un travail sur la lumière zénithale révèle la structure en béton armé qui est une œuvre à part entière. À présent, les collections “Archéologie” et “Beaux-Arts” ne sont plus isolées : les Cranach ne sont pas très loin de la section sur la fin de l’époque préhistorique et Le Triomphe de Neptune (mosaïque du IIe siècle) se trouve à proximité de la sculpture du début de la Renaissance. Ces confrontations sont très stimulantes pour l’imagination et permettent de créer des liens entre périodes et styles, même si nous demeurons dans un parcours chrono-thématique, des silex de la préhistoire aux œuvres de nos jours.

© Jean-Charles Sexe

Le décloisonnement a-t-il révélé des dialogues inattendus entre les pièces ?
C’est très beau de regarder la mosaïque de Neptune puis de voir, dans le même axe, les sculptures de la fin du XIVe siècle. Tout l’accrochage est construit sur le thème de la survivance : il montre comment les formes, d’une incroyable longévité à travers les siècles, peuvent subsister.

Le nouvel accrochage est original, entre accumulation et mise en exergue d’œuvres…
Nous avons voulu créer plusieurs rythmes. Certains murs, en tapisserie, renvoient à notre fonds, constitué en grande partie grâce au don de collectionneurs possédant essentiellement des petits formats qui étaient exposés regroupés. Pour offrir des souffles, des surprises, aucune salle ne ressemble à la précédente. La monotonie est rompue par l’architecture et l’accrochage parfois à même le béton du cube que Miquel a comme fait tomber dans la cour du Musée de manière audacieuse.

Un focus est fait sur la Venise du XVIe siècle, avec des toiles du Titien ou de Tintoret, même si vous déplorez l’absence de Véronèse. Il y a d’autres “trous” dans votre collection ?
Nous sommes connus pour notre Déploration sur le Christ mort (vers 1545) de Bronzino : on pourrait s’attendre à découvrir un grand ensemble florentin, alors que le Musée ne possède “que” ce chef-d’œuvre et quelques dessins… Comme c’est impossible de faire une section autour du Florence du XVIe siècle, nous avons isolé le Bronzino. Il faut composer avec les manques, même si on se défend très bien avec le XVIIIe siècle français, très riche ! Nous ne sommes pas une encyclopédie de l’Art, mais avons quelques bons jalons.

 

© Yohan Zerdoun

Quelle est votre section favorite de la collection ?
Celle qui me fait le plus de bien est la partie dédiée au XVIIIe siècle. Notre collection, d’une grande “justesse”, permet de parfaitement comprendre cette période. Les trois salles, où l’ambiance est douce, dans des coloris verts clairs, produisent quelque chose de miraculeux…

Percevez-vous le Musée comme un lieu de dévotion ?
C’est un endroit laïc, républicain… et de dévotion, oui, avec des sortes d’autels, des ex-voto, des éléments de la croyance. Ça n’est pas un hasard si nous avons accroché le Bronzino dans un espace que nous appelons “la chapelle de béton”.


Réouverture du Musée des Beaux-Arts et d’Archéologie de Besançon, vendredi 16 novembre mbaa.besancon.fr

Maîtres carrés : Marnotte et Miquel au pied du mur, du 16 novembre au 14 avril 2019
Dessiner une Renaissance. Dessins italiens des XVe et XVIe siècles, du 16 novembre au 18 février 2019
Et le désert avance (œuvres du Frac Franche-Comté disséminées dans le Musée)

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