Indianart jones

Photo de Stéphane Louis pour Poly

Deux institutions d’Offenbourg se sont réunies pour rendre hommage à l’artiste alsacien Raymond-Émile Waydelich : plus de 150 pièces témoignent d’une imagination débridée et d’une absolue poésie, entre archéologie du futur et Lydia Jacob Story.

Elsass Schwarzwald, 2002, © Christophe Hamm

« Dans le domaine de l’Art, je suis un supermarché comme Lidl. On trouve de tout chez moi », se marre Raymond-Émile Waydelich (né en 1938). Un résumé lapidaire, mais efficace que reflète une exposition où sont rassemblés maquettes de bateaux, poteries alsaco-crétoises, aquatintes pleines d’animaux fantastiques formant un mythique bestiaire, aspirateur en marbre que ne renierait pas Jeff Koons, décor d’un opéra dingo fondé sur l’histoire de Heidi, masques africains faits de fragments de chaises de bistrot Thonet ou encore inoffensive kalach’ en céramique. Foutraque l’artiste alsacien ? « Ceux qui font toujours la même chose doivent s’emmerder », esquive-t-il dans une pirouette. On discerne néanmoins des lignes directrices fortes qui structurent son œuvre : il est un éternel « archéologue du futur », créant une discipline scientifique nouvelle et ludique, tentant d’imaginer ce que notre monde laissera aux générations à venir. Illustration avec L’Homme de Frédehof – dont sont montrés des travaux préparatoires – présenté au Pavillon français de la Biennale de Venise en 1978 ou de fascinantes boîtes reliquaires, véritables mondes en miniature.

Autre composante du corpus waydelichien, l’histoire de Lydia Jacob : en 1973, il achète aux puces le cahier d’une apprentie couturière de Neudorf née en 1876, à l’écriture appliquée et au dessin sûr. Il décide de « [s’]associer avec elle » pour raconter son existence, imaginant un arbre généalogique (créant quatre ancêtres exerçant les métiers qu’il considère comme idéaux, pêcheur professionnel, archéologue of course, photographe et botaniste au Musée zoologique de Strasbourg), ses voyages… Tous deux cosignent chaque pièce avec pour seule limite l’imagination de Raymond & Lydia. Le visiteur découvre ainsi le journal de ses randonnées sur les sommets vosgiens ou celui de ses pérégrinations africaines et part à la rencontre d’une mythologie toute personnelle faite de bestioles dessinées à l’encre de Chine, devenues familières avec le temps, dont les mouvements sont indiqués par des flèches : griffues et toutes de dents, menaçantes parfois, souriantes et semble-t-il accortes aussi, ces créatures prennent différentes formes. Centaures, cochons ou crocodiles volètent dans le ciel de Crète – une île que le plasticien affectionne tout particulièrement – dont il a su capter la fulgurance ensoleillée.

À la Städtische Galerie et au Kunstverein (Offenbourg), jusqu’au 28 mai

galerie-offenburg.de

kunstverein-offenburg.de

 

 

> À l’occasion de l’exposition est publié un passionnant catalogue bilingue (modo Verlag, 32 €)
modoverlag.de

vous pourriez aussi aimer