Ghost world

Une plongée dans La Mer d’Aral, une inhalation d’Opium, un Long dimanche blanc ou un troublant Rêve érotique… Le premier album de la lorraine Fantôme laisse une étrange impression : celle d’avoir été traversé par le spectre d’un lointain aïeul.

Nabie, le premier album de la messine Fantôme, est une collection de complaintes ancestrales entremêlant piano, harpe et voix (utilisée comme un instrument), de chansons folk dépouillées à la semblance d’inquiétantes réminiscences du passé. De quelle époque est cette artiste créant dans la solitude de son home studio ? « Lorsque je compose, c’est une volonté spirituelle de ne pas m’inscrire dans une période, d’être hors du temps », assure Josépha Mougenot (son nom dans le civil) qui avoue cependant sa fascination pour la jonction entre le XIXe et le XXe siècle : les mots d’Edgar Allan Poe, la grâce d’Isadora Duncan*, le mouvement anthroposophique de Rudolf Steiner ou le courant Nabi ayant donné son titre au disque de Fantôme dont les compositions reflètent, selon elle, l’intérêt de Sérusier et ses compagnons pour la recherche chromatique et la quête de symbolisme. « Mes chansons viennent de la frustration de ne pas être peintre et mes morceaux sont autant de visions de toiles que je ne ferai jamais. »

isadora

Depuis l’enfance, cette “funambule au cœur suspendu” se crée un refuge afin d’entrer dans un état de « transe austère » pour engendrer des chansons qui lui arrivent par elles-mêmes ou presque. « J’ai fait le choix esthétique d’enregistrer live, chez moi, dans un esprit DIY. » Même si elle cite l’Art brut, Josépha a un lourd bagage musical, ayant notamment étudié le chant indien durant une dizaine d’années, pratiqué le jazz, joué de la harpe ou de la vielle à roue dans différents groupes rock ou noise et s’intéressant actuellement à la musique médiévale japonaise.

Ses influences ? Les folkeuses Cat Power, Marissa Nadler, Jessica Pratt, Josephine Foster et Joanna Newsom (« un génie vivant »), mais aussi Moondog, Satie ou la musique baroque. Autre source d’inspiration : ses rêves, érotiques ou non. « Opium, par exemple, est la pure et simple description factuelle d’un rêve. Je trouve passionnant que les aborigènes d’Australie considèrent le songe comme une autre vie, bien réelle. » Son désir le plus tenace demeure de sonder une de ses rêveries qui lui revient depuis l’adolescence où elle entend un magnifique album inédit de PJ Harvey. Josépha adorerait pouvoir y retourner et reproduire ce trésor caché, ramener ces morceaux fantômes de ce côté-ci du miroir.

artwork

Sortie de Nabie, édité par Nuun Recors, vendredi 7 octobre

www.nuun-records.com

Release party, jeudi 6 octobre à l’Espace B (Paris)

www.espaceb.net

Exposition de Musiques graphiques-musiques de pluie à la galerie Le Leé à Metz, du 18 au 20 novembre (live à la harpe le 18 novembre)

www.le-lee.com

 * Josépha Mougenot a écrit le scénario d’une BD sur Isadora Duncan dessinée par Jules Stromboni et éditée par Naïve – www.naive.fr

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