En avant la musique

Henry Valensi, Symphone en jaune, étude, 1935 © Collection privée, Courtesy Galerie Le Minotaure ADAGP Paris, 2017

À Montbéliard se déploie une passionnante rétrospective dédiée à Henry Valensi (1883-1960) : à la découverte des toiles irradiantes de couleurs du fondateur du musicalisme.

Tableaux, mais aussi travaux préparatoires, documents, objets, photos : construite chronologiquement, la rétrospective intitulée La Musique des couleurs dédiée à Henry Valensi permet de mieux connaître un artiste qui fit un rapide passage par la case impressionnisme avant 1910. Il rejoint ensuite la Section d’Or1, développant un cubisme orphique2. Peintre aux armées dans les Dardanelles au cours de la Grande Guerre, il plonge ses pinceaux dans le futurisme après le conflit : hydravions, automobiles ou locomotives foncent à toute berzingue, pétaradant dans une cascade chromatique heureuse. En 1923, il expose notamment aux côtés de Marinetti des pièces pleines de mouvement, convaincu que le cinéma en couleur, alors à ses balbutiements, fera « passer l’œuvre peinte du chevalet à l’écran ».

Avec ses complices Charles Blanc-Gatti, Gustave Bourgogne et Vito Stracquadaini, il jette les bases du musicalisme en 1932, affirmant dans un manifeste qui fit du bruit qu’il faut « œuvrer en obéissant aux lois d’inspiration et de composition de la musique ». Ses tableaux se métamorphosent alors en véritables partitions : en témoigne une Symphonie en jaune (1935) aux pigments vibratoires marquée par une puissante harmonie entre formes et teintes générant une intense émotion esthétique. Ces abstractions lyriques sont parfois inspirées de pages comme la Marche funèbre de Chopin ou les Jeux d’eau de Ravel. Pendant la Seconde Guerre mondiale, exilé à Alger, Henry Valensi met le musicalisme au service de la propagande gaulliste… mais la grande affaire de son existence sera la cinépeinture, une odyssée qui l’occupa de 1936 à 1959. À partir de La Symphonie printanière, toile de 1932, il réalise un film de 30 minutes, une « peinture en mouvement » (présentée dans le cadre de l’exposition) faite de 64 000 dessins sur celluloïd. « On va passer de l’abstraction des années 1930 aux années 1960, avec, par moment, une dimension psychédélique », explique Michel Gauthier, conservateur au Centre Pompidou, qui rajoute que défilent là « tous les possibles de ce qu’a pu engendrer la peinture pendant 30 ou 40 ans ».

 

Au Musée du Château des Ducs de Wurtemberg (Montbéliard), jusqu’au 17 Septembre

montbeliard.com

 > Mercredi 31 mai à 18h, rencontre avec Didier Vallens, neveu du peintre et Marie Talon, auteure du livre Henry Valensi (1883-1960), l’heure est venue… (réservation conseillée au 03 81 99 22 53)

 

1 Émanation du Groupe de Puteaux, rassemblant des cubistes souhaitant réconcilier art et science qui organisa le Salon de la Section d’or, en 1912. On y retrouve Duchamp, Picabia ou Gleizes.

2 Guillaume Apollinaire rapproche le cubisme orphique de la musique avec sa poésie pure et l’oppose au cubisme scientifique

Henry Valensi, Symphone en jaune, étude, 1935 © Collection privée, Courtesy Galerie Le Minotaure ADAGP Paris, 2017

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