Demain c’est loin

Photo de Laure Werckmann

Après un an d’ateliers avec des lycéens alsaciens initiés par la compagnie Les Méridiens, les auteurs Daniel Keene et Luc Tartar ont livré chacun un texte dramatique. Maybe # Peut-Être, deux pièces successives autour de l’utopie.

Laurent Crovella n’aime pas faire les choses à moitié. Lorsqu’il se penche sur les utopies de la jeunesse actuelle, le metteur en scène embarque avec lui deux auteurs contemporains dans sept lycées (généraux comme professionnels) à la rencontre de plus de 200 élèves. L’équipe de sa compagnie se mobilise pour mener des ateliers de paroles, d’auto-interviews puis d’écriture autour de leurs rêves pour demain. Plus que de traditionnelles actions artistiques, Utopies 1.2 était l’occasion de replacer ces futurs adultes au cœur du théâtre, de partir de leur vision du monde. Le projet a fonctionné comme un labo inspirant, un échange de cultures et de points de vue, un partage d’imaginaires dont le contenu a décanté en Daniel Keene et Luc Tartar. Chacun a écrit une courte pièce, mise en scène successivement par Laurent Crovella. Maybe # Peut-Être débute avec deux jeunes SDF. Baptiste rejoint Manon sur son spot avec un sac de couchage. Une journée ordinaire dans la vie de deux jeunes en rupture qui partagent leur rêves à haute voix. La raideur du quotidien composé par Daniel Keene tranche avec la douceur enveloppant leur relation. Baptiste a le béguin pour cette fille dont le chien a fui, du jour au lendemain.

Photo de Laurent Robert

 

Même si elle est enceinte de quatre mois et fait mine de ne pas voir qu’elle ne le laisse pas indifférent, le personnage joué par Laure Werckmann se complait dans l’humour et la présence irradiante dégagée avec subtilité par le bagout bien senti de Laurent Robert, incroyablement juste de retenue dans ses sentiments. Les mots de l’écrivain australien sont crus, les phrases aussi vives et coupantes que les risées glaciales du matin. Ici on ne triche pas, on garde des forces. « La dernière fois que tu t’es sentie bien ? », lance-t-il. Une balade avec son chien durant laquelle elle s’imaginait déjà avec sa fille. Pour lui, une nuit sans se faire emmerder, après un bon repas, qui le vit se réveiller encore rassasié. Le duo aurait bien besoin de vacances en fait. S’échafaudent alors les rêves d’une chambre, proprette et décorée. Ce serait bien pour la petite, et il pourrait y avoir un petit coin pour lui. Maybe. Dans le même décor minimaliste, la révolution du soleil depuis l’embrasement de l’aurore sur des murs blancs laisse place à une lumière froide. Dans un lit d’hôpital, une femme répond aux questions d’un chirurgien : Chuck Berry en fond sonore, le protocole de réveil suit son cours. Suite à une opération des yeux, il contrôle sa vision. Son mari rejaillit dans un trouble de la perception. Dialogue intérieur ? Hallucination ? Nous revivons leurs espoirs d’avant, le chirurgien se lançant avec elle dans une battle d’utopies sur fond de punchlines et d’hashtags. Les souvenirs remontent, jusqu’à l’accident… Il va falloir réapprendre à vivre. #Peut-Être.


 > À la Maison des Arts (Lingolsheim), vendredi 1er décembre dans le cadre du Festival Strasbourg Méditerranée

lingolsheim.fr

strasmed.com

 > À la Comédie de l’Est (Colmar), du 12 au 15 décembre dans un lycée de la ville

> Au lycée Stoessel (Mulhouse), lundi 5 et mardi 6 février 2018 dans le cadre du Festival Momix

momix.org

> EPCC Bords 2 Scène (Vitry-le-François), du 15 au 18 mai 2018

bords2scenes.fr 

 

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