Le parfum

Après avoir enchanté la dernière édition des Giboulées avec La Valse des Hommelettes, Patrick Sims crée son nouveau spectacle au TJP : Ambregris. Un conte initiatique et olfactif dans l’antre d’un cétacé, entre obsessions et figure paternelles.

Nichée dans un petit village de l’Allier, non loin du Cube de Pierre Meunier, la compagnie Les Antliaclastes invente des spectacles à nulle autre pareille. S’ils viennent des États-Unis, de Grande-Bretagne, d’Espagne ou d’Allemagne, ses membres n’ont pas moins élu domicile à Maillet et aux alentours. C’est là que maturent leurs projets marionnettiques aux scénographies redoutables d’ingéniosité, peaufinées avec le plus grand soin. Ainsi en va-t-il d’Ambregris, dont la première sera donnée à Strasbourg. Patrick Sims, metteur en scène, acteur-manipulateur et facteur de marionnette, a imaginé un orgue à parfum géant. « Chaque note correspond réellement à une odeur, même si nous n’arriverons pas à les faire toutes sentir comme on le rêvait… », confie celui qui a passé deux semaines chez un maître parfumeur italien pour approcher cette matière inédite. S’il en est revenu avec « beaucoup d’idées de diffusion, par chauffement d’huiles, par refroidissement, par ventilation ou atomisation », il n’en reste pas moins « extrêmement difficile de remplir une salle avec. De la vider aussi des senteurs. » Un travail par couches s’impose, employant les notes de base au début avant d’en rajouter… Pour réaliser Dulcinée – du nom de la compagne imaginaire de Don Quichotte – le parfumeur de l’histoire représenté par un masque d’énorme nez est à la recherche d’ambre gris. La fragrance, produite par le système digestif des cétacés, est au centre de cette opérette alchimique pour marionnettes. Elle seule permet de lier harmonieusement des parfums disparates et sa rareté la rend plus précieuse que l’or. Dans une scénographie reproduisant un squelette de baleine, « sorte d’alambic alchimique », le voilà lançant le Capitaine Achab, spécialiste des baleines depuis ses joutes avec Moby Dick, à la recherche d’ambregris. Il se retrouvera dans l’antre de la bête avec Pinocchio, pantin ne voulant pas en sortir pour ne pas devenir un petit garçon, mais aussi le Jonas de la Bible, avalé pour avoir perdu la foi. Sous ses faux airs d’orgue à vapeur, le tout sert de « four alchimique modifiant les substances et les êtres : de la merde en or, une marionnette en homme, un infidèle en croyant », rigole Patrick Sims. Au milieu d’une fée bleue, d’un bébé calamar et sa mère, d’une huître géante et de sa perle, ou encore d’un génie de lampe, ce conte initiatique et drolatique s’attaque à nos obsessions et aux figures paternelles d’autorité : Jonas suivant Dieu, Pinocchio cherchant son père dans l’antre de la baleine mais voulant rester libre même s’il demeure un pantin de bois, et Achab voulant enfin en finir avec son maître.


Au TJP grande scène (Strasbourg), du 22 au 24 novembre (dès 10 ans)
tjp-strasbourg.com

> Rencontre avec l’équipe artistique vendredi 23 novembre à l’issue de la représentation

vous pourriez aussi aimer